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Après l’inscription de l’IVG dans la Constitution, la presse internationale salue un vote « historique »

by Marko Florentino
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« La France est devenue le premier pays au monde à consacrer explicitement le droit à l’avortement dans la Constitution. » Que ce soit aux Etats-Unis, en Espagne, en Allemagne ou encore en Argentine, de nombreux médias dans le monde ont évoqué avec les mêmes mots le caractère « historique » du vote des parlementaires réunis en Congrès à Versailles, lundi 4 mars,  qui ont modifié la Loi fondamentale pour protéger la liberté d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse (IVG).

« Une cérémonie solennelle et émouvante dans le cadre auguste de l’hémicycle de l’aile sud du château de Versailles, symbole du pouvoir absolu de Louis XIV, le Roi-Soleil, et de la grandeur française », a notamment décrit le quotidien espagnol El Pais, décrivant la « charge émotionnelle forte qui a atteint le public et les tribunes de presse ». Présent place du Trocadéro, à Paris, où étaient diffusés les débats sur un grand écran, le Washington Post est, lui, revenu sur l’explosion de joie qui a suivi l’adoption de la modification de la Constitution : « La foule a éclaté de joie. La tour Eiffel s’est illuminée de lumières scintillantes. Mères et filles s’embrassèrent. La place s’est immédiatement transformée en une immense fête de rue, avec des fêtards chantant les paroles d’une chanson de Beyoncé, “Who run the world ? Girls” ».

Pour El Pais, alors que la France avait « dans un passé récent adopté des droits sociétaux plus tardivement que d’autres pays », prenant l’exemple du mariage homosexuel, légalisé en 2013, une décennie après l’Espagne, « aujourd’hui, ce pays qui affiche ses valeurs universelles, peut se targuer d’avoir été un pionnier ». « C’est un signal fort que la France envoie au monde », a avancé, pour sa part, le quotidien allemand Die Welt, qui salue « une détermination que l’Allemagne peut suivre en exemple ».

D’autant qu’outre-Rhin, l’avortement est régi par l’article 218 du code pénal qui dispose que l’avortement est un crime en soi mais peut être dépénalisé à plusieurs conditions : s’il est pratiqué avant la douzième semaine de grossesse, si la femme enceinte a consulté un centre de conseil, ou si la grossesse est la conséquence d’un viol ou qu’elle met en danger la vie de la femme. « L’avortement “sans punition” transforme chaque Allemande qui met fin à une grossesse non désirée en une criminelle, à qui un œil est fermé tandis qu’elle est moralement condamnée de l’autre », déplore Die Welt, appelant la commission mise en place par la coalition au pouvoir pour clarifier la loi sur l’IVG « à suivre la détermination française ».

« Discours passionnés »

De nombreux médias ont rapporté le contenu des discours des députés et des sénateurs qui se sont exprimés à la tribune de la salle du Congrès. Pour le New York Times, les parlementaires français qui ont exprimé la position de leur groupe lundi après-midi « ont prononcé des discours passionnés sur les droits des femmes dans le monde pour rendre hommage aux Françaises courageuses qui se sont battues pour le droit à l’avortement lorsque celui-ci était illégal ».

« Tout au long de cette séance, les parlementaires ont rendu hommage à Simone Veil [à l’origine de la loi autorisant l’IVG, en 1975], ainsi qu’à Gisèle Halimi, l’ancienne avocate dont la défense d’une étudiante de 16 ans qui avait subi un avortement illégal après avoir été violée avait conduit à son acquittement en 1972 », poursuit le quotidien américain, rappelant l’évolution du droit à l’IVG dans le droit français. « La modification de la Constitution ne modifie pas le contenu de la législation telle qu’elle existe aujourd’hui », précise le Washington Post, qui explique qu’il sera néanmoins « plus difficile pour un nouveau gouvernement d’interdire l’avortement à moins de quinze semaines ou même de décider que l’avortement n’est plus couvert par la Sécurité sociale ».

En Argentine, Clarin a notamment remarqué la « référence à [leur] pays » de la tenue, tout en vert, portée par la présidente du groupe « insoumis » à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot. Il s’agissait, en effet, d’un hommage aux militantes argentines pro-IVG qui s’étaient rassemblées autour de cette couleur durant des manifestations en 2020 qui avaient abouti à la légalisation de l’avortement dans le pays sud-américain.

La présidente du groupe « insoumis » à l’Assemblée, Mathilde Panot, au Congrès réuni à Versailles, le 4 mars.

Une réponse à la Cour suprême américaine

L’ensemble des médias qui ont couvert cette information ont également relevé que cette inscription de l’IVG dans la Loi fondamentale française « était une réponse » à la décision prise par la Cour suprême en juin 2022 d’abroger l’arrêt Roe vs Wade, qui accordait depuis 1973 aux Américaines le droit d’avorter dans tout le pays. Six propositions de loi avaient été déposées dans la foulée en France pour protéger l’IVG aboutissant dix-huit mois plus tard à la convocation du Congrès afin de modifier la Constitution.

« Aux Etats-Unis comme en France les sondages montrent qu’une majorité de personnes soutiennent largement le droit à l’avortement. Mais l’avortement divise davantage aux Etats-Unis qu’en France », poursuit le Washington Post. Clivant très fortement les démocrates et les républicains, la question de l’avortement est d’ailleurs perçue comme un des thèmes majeurs de la campagne pour l’élection présidentielle à venir aux Etats-Unis qui pourrait opposer le président sortant, Joe Biden, à son prédécesseur, Donald Trump.

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Le Wall Street Journal estime, par ailleurs, que le vote lundi « marque un rare moment d’unité au sein du Parlement français qui est divisé », depuis qu’Emmanuel Macron « a perdu sa majorité absolue à l’Assemblée nationale pendant que l’extrême gauche et l’extrême droite gagnaient du terrain ». Pour le quotidien économique américain, cette adoption par le Parlement survient après que l’exécutif français a usé, ces derniers mois, de « ses pouvoirs constitutionnels pour contourner le législateur », rappelant ainsi l’utilisation à vingt-trois reprises de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution qui a permis de faire adopter sans vote les textes budgétaires et la réforme des retraites en mars 2023.

En Suisse, Le Temps a également vu dans cette constitutionnalisation de l’IVG un vote « bien pratique pour le camp présidentiel », lui permettant de « pointer les menaces d’une arrivée au pouvoir du Rassemblement national, particulièrement gêné aux entournures sur ce sujet ». Les députés d’extrême droite se sont, en effet, montrés très divisés sur le sujet : 46 élus RN sur 88 ont voté pour, 11 contre et 20 se sont abstenus. Onze d’entre eux n’ont pas pris part au vote.

Écouter aussi IVG : la constitutionnalisation, ça change quoi ?

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