
« Tout ce qui a été construit ici pendant toutes ces années avec lui a été enterré ici », se désole Roman, un jeune homme de 29 ans qui dit travailler dans l’informatique. Des centaines de Russes continuaient de défiler samedi 2 mars à Moscou devant la tombe d’Alexeï Navalny, principal détracteur de Vladimir Poutine, mort en prison, pour lui rendre hommage, au lendemain d’obsèques où des milliers de Moscovites s’étaient rassemblés malgré les mises en garde du Kremlin.
Dans l’après-midi et sous un soleil d’hiver, des dizaines de personnes faisaient la queue devant la sépulture de l’opposant, bouquets de fleurs en main, a constaté un journaliste de l’Agence France-Presse. Comme la veille, la police avait installé des portiques de détection métalliques à l’entrée du cimetière. Certaines des personnes venues, dont beaucoup de jeunes qui constituent la base des soutiens de Navalny, passaient devant la tombe de l’opposant les larmes aux yeux.
La veille, certains avaient scandé « Non à la guerre ! » et d’autres slogans en faveur de Navalny, qualifiant notamment Poutine de « meurtrier » et appelant à la « libération des prisonniers politiques ».
Déjà présente vendredi, sa mère, Lioudmila Navalnaïa, s’est de nouveau recueillie samedi matin sur la tombe de son fils, largement recouverte de fleurs et de couronnes, au cimetière de Borissov, dans le sud de la capitale russe. Elle était accompagnée d’Alla Abrossimova, la mère de la veuve de M. Navalny, Ioulia Navalnaïa.

Sa femme, Ioulia Navalnaïa, ainsi que les deux enfants du couple et son frère, vivent à l’étranger et n’ont, eux, pas pu pas assister aux funérailles, où ils auraient pu être arrêtés pour opposition au Kremlin. La veuve d’Alexeï Navalny s’est engagée à poursuivre le travail de son mari et a déclaré à plusieurs reprises ces derniers jours que Vladimir Poutine l’avait « assassiné », ce que le Kremlin nie fermement.
128 personnes arrêtées vendredi
M. Navalny, le plus féroce critique de Vladimir Poutine depuis plus de dix ans, est mort le 16 février à l’âge de 47 ans dans une colonie pénitentiaire de l’Arctique, où il purgeait une peine de dix-neuf ans de prison pour « extrémisme ». Les multiples procès qui lui avaient été intentés avaient été largement dénoncés comme étant une manière de le punir pour son opposition à Vladimir Poutine.
L’ONG de défense des droits humains OVD-Info a déclaré que la police russe avait arrêté vendredi au moins 128 personnes participant à des hommages à Navalny dans 19 villes. Le Kremlin avait averti les sympathisants de l’opposant de potentielles sanctions en cas de participation à toute manifestation « non autorisée » à l’occasion de ces funérailles.
Les scènes de milliers de personnes défilant en soutien à M. Navalny, réclamant la fin de l’assaut russe en Ukraine et fustigeant le Kremlin, n’ont pas été vues en Russie depuis les premiers jours qui ont suivi l’ordre donné par Moscou à des centaines de milliers de soldats de franchir la frontière, à la fin de février 2022.