
Le meurtrier présumé d’un jeune Malien, vendredi, dans une mosquée du Gard, « s’est rendu de lui-même » dans un commissariat de Pistoia, en Italie, dimanche 27 avril, vers 23 heures, a annoncé tôt lundi à l’Agence France-Presse (AFP) le procureur de la République d’Alès, Abdelkrim Grini.
« C’est une très grande satisfaction pour le procureur que je suis. Face à l’efficacité des moyens mis en place, l’auteur n’a eu pour seule issue que de se rendre et c’est la meilleure chose qu’il pouvait faire », a déclaré M. Grini, joint par téléphone par l’AFP.
L’homme est suspecté d’avoir poignardé Aboubakar Cissé, un fidèle musulman, de dizaines de coups de couteau, vendredi matin, dans la mosquée de la commune gardoise de La Grand-Combe. Il était présenté comme « potentiellement extrêmement dangereux » par le procureur.
« Dans l’enquête pour retrouver l’auteur de la mosquée de [La] Grand-Combe qui s’est rendu ce matin en Italie comme dans celle sur les violences contre les prisons et les agents pénitentiaires, les magistrats et les enquêteurs ont fait preuve d’une grande détermination et d’un grand professionnalisme qui a permis d’obtenir des résultats dans des temps très courts », se félicite le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, sur X. L’Agence France-Presse avait auparavant fait état d’une vingtaine d’interpellations dans l’enquête sur les actes qui ont visé plusieurs prisons ces dernières semaines.
Ouverte pour homicide vendredi, celle de La Grand-Combe est menée depuis samedi pour assassinat, soit meurtre avec préméditation, a précisé le procureur de la République d’Alès, Abdelkrim Grini. « L’auteur présumé a été formellement identifié. Nous travaillons maintenant pour essayer de l’interpeller dans des délais (…) les plus rapides possibles », avait-il insisté dimanche.
Les éléments officiellement communiqués sur le meurtrier présumé sont pour l’instant peu nombreux : né à Lyon en 2004, « Olivier » est un homme de nationalité française, issu d’une famille bosnienne, dont une partie réside dans le Gard. Sans aucun antécédent judiciaire, il serait sans emploi.
Dans « les propos décousus » que le jeune homme tient dans la vidéo qu’il a lui-même filmée vendredi juste après son agression, face à sa victime agonisante, il semble, en effet, « manifester son intention de recommencer », avait précisé samedi soir le magistrat à l’Agence France-Presse. Dans la même vidéo, le meurtrier était entendu se féliciter de son acte et insulter la religion de sa victime.
Plus de soixante-dix enquêteurs mobilisés
« La piste d’un acte antimusulman est privilégiée mais n’est pas la seule », avait expliqué le procureur de la République. « Certains éléments pourraient nous laisser penser que ce mobile n’était peut-être pas le mobile premier (…) ou le seul mobile », ajoutait-il, s’exprimant devant la sous-préfecture après une intervention du ministre de l’intérieur. Bruno Retailleau avait déclaré avoir « mobilisé plus de 70 enquêteurs », venus de Montpellier, de Nîmes, de Paris et d’autres territoires français.
M. Retailleau s’est rendu à Alès, dimanche après-midi, notamment pour y rencontrer les élus locaux et le président du conseil départemental du culte musulman. « Je voudrais dire à la communauté de nos compatriotes français musulmans qu’être Français, être membre de la communauté nationale, ce n’est pas une question de couleur de peau, ce n’est pas une question de religion, ce n’est pas une question de condition sociale. On est français, un point c’est tout. Je voudrais leur dire vraiment la plus totale solidarité de l’ensemble du gouvernement », a notamment déclaré le ministre. Interrogé en fin de journée sur BFM-TV, le ministre a dit avoir demandé un renforcement des mesures de sécurité autour de « toutes les mosquées de France ».
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Emmanuel Macron a assuré, dimanche, que « le racisme et la haine en raison de la religion n’auront jamais leur place en France ». « La liberté de culte est intangible », a insisté le chef de l’Etat sur le réseau social X. Il a également adressé « le soutien de la nation » à la famille de la victime et « à nos compatriotes de confession musulmane ».
Selon Mourad Battikh, l’un des avocats de la famille de la victime, il ne fait « aucun doute » que ce meurtre est « un attentat » et « une attaque de nature terroriste » : « Il est évident que le Parquet national antiterroriste doit se saisir de cette affaire sans délai », a-t-il plaidé dans un communiqué sur Instagram, estimant que « la communauté musulmane doit bénéficier du même traitement que tout autre citoyen ». La garde à vue du frère du suspect a été levée samedi en fin d’après-midi, aucune charge n’ayant été retenue contre lui, a précisé Abdelkrim Grini.
Rassemblement « contre l’islamophobie »

Une marche blanche en hommage à la victime a rassemblé plus d’un millier de personnes dimanche après-midi, entre la mosquée et la mairie de cette commune de moins de 5 000 habitants. Plusieurs personnalités politiques comme le chef de file de La France insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon, ou la patronne des Ecologistes, Marine Tondelier, ont participé à un rassemblement « contre l’islamophobie », organisé à Paris dimanche en fin de journée et dont l’appel a été relayé notamment par des partis de gauche sur les réseaux sociaux.
« Une ambiance, un climat islamophobe a été entretenu, cultivé, et des mois durant, et chacun jusqu’aux plus officiels, s’est senti autorisé à faire des déclarations dont sans doute, ils ne mesuraient pas toute la portée et toute la violence pour ceux qui avaient à la subir », a déclaré M. Mélenchon à la presse, en visant le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau. Interrogé au même moment sur BFM-TV, le ministre avait exclu de participer à ce rassemblement, jugeant que LFI « instrumentalise ce crime ».
« Il fait peu de doute que son auteur a été motivé par la haine des musulmans face aux dernières informations révélées », avait assuré la Grande Mosquée de Paris sur X. Celle-ci demande aux autorités de faire savoir au public si la piste terroriste est privilégiée : « Nous devons considérer la dimension et la gravité d’un tel acte, et agir pour la sécurité de tous », a-t-elle ajouté.
« L’assassinat d’un fidèle dans une mosquée est un crime ignoble qui doit révulser le cœur de tous les Français », a également réagi le Conseil représentatif des institutions juives de France. Le délégué national de la Conférence des évêques de France pour les relations avec les musulmans, Jean-François Bour, a dit sur X condamner « fermement l’assassinat ». « Une réponse ferme à la haine antimusulmane est urgente ! », a-t-il insisté.