A 75 ans, Jean-Claude Gandur n’a rien perdu du sourire gourmand du chasseur. Ses yeux pétillent quand il raconte par le menu l’histoire d’une cassette recouverte d’émaux de Limoges, offerte par François Ier à Henri VIII, ou les pérégrinations d’un tableau du mouvement Gutai acheté à un propriétaire de boîte de nuit du sud de la France. Dans son pied-à-terre parisien, les antiquités romaines côtoient des tableaux des peintres Georges Mathieu (1921-2012) ou Hans Hartung (1904-1989), deux précurseurs de l’abstraction française d’après-guerre – de ce dernier, il ne possède pas moins de vingt-sept œuvres.
En cinquante ans, l’homme d’affaires helvétique, dont la fortune est évaluée à 2 milliards de francs suisses par le magazine économique Bilan, a accumulé une impressionnante collection de 3 800 œuvres, articulée entre l’archéologie et la peinture européenne des années 1960-1970, abritée, depuis 2010, dans une fondation genevoise.
Après avoir initialement voulu donner cet ensemble au Musée d’art et d’histoire de Genève, il s’est heurté à l’échec du projet architectural de Jean Nouvel, à la suite de considérations politiques locales, et a commencé à prospecter en France, où sept villes se sont mises sur les rangs pour l’accueillir. Fin 2023, seules restaient en lice les municipalités de Caen, Bordeaux et Strasbourg, avant que la première ne remporte la mise.
Pourquoi avez-vous finalement choisi d’établir votre musée en Normandie, à Caen, qui compte le plus petit bassin de population des trois villes finalistes ?
Caen est un lieu d’histoire, qui a eu une importance capitale dans celle de l’Europe, depuis l’époque des Plantagenêts, au XIIe siècle, jusqu’au Débarquement, lors de la seconde guerre mondiale. La ville, qui attire un million de visiteurs pour les plages du Débarquement, a fait de la culture un élément d’attractivité majeur.
J’ai trouvé face à moi des gens qui ont fait tous les efforts possibles pour que je me sente chez moi. Le soutien de l’ensemble du conseil municipal, quelle que soit la coloration politique, m’a conforté. Le maire de Caen [Joël Bruneau, Les Républicains] offre à l’association qui gérera le futur musée un terrain de 51 000 mètres carrés, près du Mémorial, au sein d’un parc très vert. La ville a proposé de redessiner la route et de réduire le trafic automobile, pour relier harmonieusement cette parcelle avec la colline aux Oiseaux voisine.
Pourquoi créer un musée après avoir montré différentes facettes de vos collections par le biais d’expositions ?
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