Quelque 21 millions de Vénézuéliens votent dimanche 28 juillet lors d’une élection présidentielle tendue entre le président sortant Nicolas Maduro et le diplomate Edmundo Gonzalez Urrutia. Les trente mille bureaux de vote ont ouvert à midi (heure de Paris) et resteront ouverts jusqu’à 18 heures avec des résultats attendus dans la nuit. Les experts estiment que la participation est un des éléments-clés du scrutin, l’opposition ayant besoin d’une forte mobilisation pour gagner.
Dix candidats sont en lice, mais le scrutin se résume à un duel entre M. Maduro, 61 ans, qui brigue un troisième mandat de six ans, et le discret Edmundo Gonzalez Urrutia, 74 ans, qui a remplacé au pied levé la charismatique cheffe de l’opposition Maria Corina Machado, déclarée inéligible. Les sondages donnent l’opposition largement en tête, mais certains observateurs assurent que la lutte est serrée. S’appuyant sur d’autres chiffres, le régime affirme être confiant en sa victoire.
« Je reconnais et je reconnaîtrai l’arbitre électoral, les communiqués officiels et je les ferai respecter », a déclaré M. Maduro après avoir voté à Caracas, alors que l’opposition craint des fraudes ou une manipulation. Héritier d’Hugo Chavez, ancien président d’inspiration socialiste de 1999 jusqu’à sa mort en 2013, M. Maduro, qui s’appuie sur l’armée et un harcèlement policier de l’opposition, promet régulièrement qu’il ne cédera pas le pouvoir, prédisant le chaos sans lui.
« L’avenir du Venezuela pour les cinquante prochaines années se décide le 28 juillet, entre un Venezuela de paix ou de violences. Paix ou guerre », a-t-il lancé, après avoir évoqué un possible « bain de sang dans une guerre civile fratricide provoquée par les fascistes ». Ces propos ont « effrayé » le président brésilien, Lula, pour qui « Maduro doit apprendre que quand on gagne, on reste [au pouvoir]. Quand on perd, on s’en va. »
Dimanche « sera sans aucun doute l’expression démocratique du peuple la plus importante de ces dernières années », a affirmé samedi M. Gonzalez Urrutia, invitant les « citoyens à se rendre dans leur bureau de vote à la fin de la journée et à constater la netteté des résultats obtenus ».
« Nous sommes prêts à défendre jusqu’au dernier vote », a-t-il dit à la presse après avoir voté, en se disant « convaincu que les forces armées veilleront à ce que la décision de notre peuple soit respectée ». La plupart des sondeurs estiment que M. Maduro ne dépassera pas les 30 % et situent l’opposition entre 50 % et 70 %.
Le pays pétrolier, longtemps un des plus riches d’Amérique latine, est exsangue, empêtré dans une crise économique sans précédent. Conséquence d’une mauvaise gestion et de la corruption, la production pétrolière s’est effondrée passant de plus de trois millions de barils par jour à un peu moins d’un million. Le produit intérieur brut s’est réduit de 80 % en dix ans et l’hyperinflation frappe l’économie. Sept millions de Vénézuéliens – un quart des habitants – ont fui le pays. Une grande partie de ceux qui sont restés vit dans la pauvreté, avec des systèmes de santé et d’éducation dans un état de délabrement complet.
Un scrutin sans observateurs de l’Union européenne
Le pouvoir accuse le « blocus criminel » d’être à l’origine de tous les maux. Les Etats-Unis avaient durci leurs sanctions pour tenter d’évincer M. Maduro après sa réélection contestée de 2018, lors d’un scrutin entaché de fraudes selon l’opposition, et qui avait débouché sur des manifestations sévèrement réprimées. Washington a tenté de forcer M. Maduro à des élections « démocratiques et compétitives » sans infléchir Caracas, qui a confirmé l’inéligibilité de Mme Machado, retiré son invitation à l’Union européenne pour observer le scrutin, et empêché l’entrée dans le pays d’anciens présidents latino-américains invités par l’opposition.
Dans le même temps, la Maison Blanche, désireuse de relancer la production vénézuélienne dans un contexte de tension sur le brut avec les crises ukrainienne et au Moyen-Orient, a ouvert la porte avec des autorisations d’exploitation pour des compagnies pétrolières étrangères. Le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, a souligné dimanche que « le peuple vénézuélien mérite une élection qui reflète réellement sa volonté, à l’abri de toute manipulation ».
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Beaucoup craignent que l’actuel président, souvent qualifié de « dictateur » par l’opposition, tente de fausser le jeu électoral. Rebecca Hanson, de l’université de Floride, juge possible que survienne « de la violence après l’annonce des résultats », soulignant que les chances de voir M. Maduro accepter de quitter le pouvoir sont « faibles ». Une des clés sera l’attitude de l’appareil sécuritaire. « La force armée nationale bolivarienne me soutient », affirme M. Maduro. Quant à son rival, M. Gonzalez Urrutia, il appelle les militaires à « respecter et faire respecter [la] volonté souveraine » du peuple.