Aporie : difficulté logique insoluble. Exemple : la gestion de Mayotte, petite île de l’archipel des Comores dans le canal du Mozambique, devenue département français en 2011. Elle concentre l’attention des médias à cause du cyclone Chido qui vient de la dévaster, comme ce fut le cas en 2023 lors des destructions programmées par l’Etat d’habitats « clandestins ».
Mayotte est restée française après le référendum de 1974 qui a donné environ 95 % de oui à l’indépendance sur le territoire global des Comores, mais près de 65 % de non à Mayotte. La décision du décompte par île ne faisait pas l’unanimité au sein du gouvernement de l’époque. Les motifs, sans doute essentiellement géopolitiques, ont-ils obscurci toute anticipation des équilibres économiques dans la région ? Ou bien le statut ambigu de collectivité territoriale, néanmoins annonciateur d’un territoire d’outre-mer relativement autonome, reflétait-il la conscience des énormes contradictions que supposait une départementalisation ?
Depuis, les Comores indépendantes revendiquent leur quatrième île, Mayotte, mais sont confrontées en 1997 à la sécession d’Anjouan et de Mohéli, qui accusent la Grande Comore – où se situe la capitale, Moroni –, des échecs de la décentralisation indispensable à un Etat pluri-insulaire. La géopolitique locale, et plus largement régionale, a sans doute à nouveau compté dans la décision de Paris, à la même période, d’engager à Mayotte l’assimilation législative conditionnant le statut de département.
Une des premières procédures fut de réviser l’état civil des habitants afin de distinguer les Mahorais, auxquels est reconnue la nationalité française selon la règle du triple droit du sol (enfant né à Mayotte, d’un parent et d’un grand-parent nés à Mayotte), des autres désormais étrangers, soumis depuis 1995 à l’obtention d’un visa, ce qui les repartage en migrants réguliers ou clandestins et décide de leur accès aux services de l’Etat.
Deux générations plus tard
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