Dans la Grande Rue de Port-Louis où s’alignent la plupart des commerces de la ville, un panneau indique, à l’entrée d’un porche, la direction de « Port-Liberté, chez Antoinette Poisson, magasin de décoration, brocante, salon de thé ». Le choix d’une typographie ancienne, inspirée du XVIIIe siècle, témoigne d’emblée d’un certain raffinement. En empruntant une ruelle, on découvre une façade blanche aux volets bleu nuage et à l’enseigne affichant fièrement ce nom chargé d’histoire.
Port-Liberté, c’est ainsi que fut rebaptisé Port-Louis durant la Révolution française pendant que sa citadelle emprisonnait nobles et royalistes. Rien d’étonnant à ce que Jean-Baptiste Martin et Vincent Farelly, passionnés de décors Louis XV, aient tout de suite aimé cette ville du Morbihan, arrimée à la rade de Lorient. Le couple de jeunes quadragénaires s’y est installé en 2020, après le premier confinement, et a ouvert, l’été dernier, une boutique-salon de thé assortie d’une chambre d’hôte perchée sous les toits.
Il y a douze ans, le duo qui veut réhabiliter le papier peint dominoté, un savoir-faire du XVIIIe siècle – les dessins y sont imprimés grâce à une planche gravée, puis mis en couleur au pochoir ou à la main –, lance la marque A Paris chez Antoinette Poisson et ouvre une enseigne à Paris, toujours en activité. Il conçoit aussi des motifs issus de rééditions anciennes ou de créations originales dans le style de l’époque.
Guirlandes de fleurs, festons, grenades, ikats ou encore pointes de diamant sont ainsi déclinés sur des papiers peints, des tissus, des coffrets en papier mâché, de la vaisselle, de la papeterie fine. Le nom de leur marque est un hommage à la marquise de Pompadour, née Jeanne-Antoinette Poisson, préférée de Louis XV et ardente protectrice des arts décoratifs.
Une technique ancienne
Dès l’entrée de leur boutique bretonne, aux murs d’un vert menthe patiné et à l’ambiance de bazar à l’ancienne, on trouve, soigneusement rangés dans un coffre en bois, une sélection de leurs papiers dominotés. Servant jadis à recouvrir des livres, à décorer l’intérieur d’armoires ou à agrémenter entresols et alcôves, on les achète désormais souvent pour les encadrer, comme des tableaux.
Les couleurs, qui semblent passées et dont la gamme a été minutieusement définie, s’étalent sur un papier précieux fabriqué par le maître d’art Jacques Bréjoux, au Moulin du Verger, en Charente, à partir de chiffons anciens pilés au maillet. « Cela donne au support une texture charnelle », explique Jean-Baptiste Martin.
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