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Dix jours après la levée des blocages, Gabriel Attal a retrouvé, mardi à Matignon, les représentants de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) et des Jeunes Agriculteurs (JA), qui maintiennent la pression sur l’exécutif à moins de deux semaines du Salon de l’agriculture.
Le premier ministre a reçu ces syndicats pendant deux heures avec le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau. « Ça s’est bien passé. On continue d’avancer, on a passé en revue tous les dossiers (…). Sur la simplification, c’est encourageant. Maintenant, (…) il faut que tout soit mis en place au moment du salon », a déclaré Arnaud Rousseau, le président de la puissante FNSEA, à sa sortie de Matignon. « Ni défiance ni complaisance », a-t-il résumé un peu plus tard lors d’un point de presse.
« Ce serait malhonnête de notre part de dire que rien ne bouge », a relevé le président des JA, Arnaud Gaillot. Mais « ça mérite encore de maintenir une pression parce que ça a encore du mal à se traduire », a-t-il ajouté en regrettant notamment un nombre insuffisant de réunions avec Bercy. Les deux responsables se sont félicités que Gabriel Attal ait accepté le principe d’un point de suivi mensuel sur les mesures de simplification. Mais « que personne ne pense que parce que les tracteurs sont rentrés, [que] les choses sont réglées », a insisté Arnaud Rousseau.
Les syndicats bientôt reçus par Macron
Emmanuel Macron recevra, lui, la Coordination rurale et la Confédération paysanne mercredi, avant la FNSEA et les JA la semaine prochaine, mardi selon Arnaud Rousseau. Comme avant chaque Salon de l’agriculture, qui s’ouvre le 24 février à Paris, a précisé l’Elysée.
« L’intérêt de cette rencontre avec le premier ministre, c’est de pouvoir faire le point, de travailler à des mesures très concrètes, puisqu’on est à mi-chemin, après l’annonce de mesures d’urgence et [avant] le Salon de l’agriculture, qui aura lieu dans onze jours », avait affirmé Arnaud Rousseau peu avant.
« Les agriculteurs n’ont jamais désarmé. Tout le monde a dit : on est prêt à repartir si le travail réalisé n’est pas au niveau des attentes, qui sont très fortes », avait-il dit aussi sur TF1, à quelques heures d’une réunion du syndicat avec Gabriel Attal à Matignon.
« Il faut accélérer le tempo »
L’ouverture du Salon, le 24 février, du traditionnel rendez-vous entre la France des agriculteurs et le monde politique doit survenir alors que l’exécutif tente d’éviter la reprise d’un mouvement suspendu le 1er février, à la suite de nouvelles annonces du gouvernement. Après deux semaines de blocages de routes et d’actions parfois tumultueuses, les manifestants ont levé le camp après cette troisième salve d’annonces, portant sur des sujets aussi divers que les pesticides, les retraites des exploitants, la simplification des normes et des aides à l’élevage ou à l’agriculture bio.
Mais les syndicats n’entendent pas baisser la pression. « Il faut accélérer le tempo », a lancé lundi le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, exhortant le gouvernement à des actes avant la tenue du Salon porte de Versailles. Il a prévenu que la qualité de l’accueil du président de la République en dépendrait.
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« On veut voir ce qui change dans nos fermes (…) Quand le gouvernement nous dit on va travailler sur un grand plan élevage d’ici le salon et qu’à quinze jours, on n’a pas de nouvelles… Si d’ici dix jours il ne devait pas y avoir ce travail de fond, ce changement de logiciel, on serait prêts à repartir à l’action », a insisté mardi le céréalier, qui est aussi président du conseil d’administration du grand groupe agroalimentaire Avril, avant d’ajouter : « On voit bien que tout le monde est au travail [mais] si on n’avait pas mis cette pression, on n’en serait pas là. »
Un agenda serré pour Gabriel Attal. Egrenant son programme de travail dimanche dans les colonnes du Parisien, le nouveau premier ministre a confirmé le dossier agricole parmi les « urgences » du printemps, avant « un été de progrès sociaux » et « un automne de travail ».
Au ministère de l’agriculture, on précise que le gouvernement travaille « tous les dossiers ». Les annonces de Gabriel Attal – avec des mesures d’urgence chiffrées à 400 millions d’euros par Bercy – ont commencé à être déclinées concrètement, affirme-t-on, évoquant, par exemple, l’ouverture depuis le 5 février des dispositifs d’indemnisation pour les éleveurs. Sur le plan local, des réunions « ont eu lieu dans toutes les préfectures de département » pour « regarder les arrêtés locaux » et « faire remonter les propositions de simplification » administrative.
« Tous les ministères sont au travail », a aussi affirmé mardi le ministre de la transition écologique, Christophe Béchu, sur Franceinfo, avant de temporiser : « Certains sujets remontent à dix, vingt ou trente ans. Je comprends une impatience qui exprime la souffrance des agriculteurs (…). Mais il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. »
La menace brandie par la FNSEA n’a pas échappé à l’opposition : Emmanuel Macron « a peur de faire un mauvais salon, il reçoit [les agriculteurs] à toute vitesse », a dénoncé le vice-président du Rassemblement national, Sébastien Chenu, sur BFM-TV et RMC, accusant l’exécutif d’avoir « menti » pour calmer la colère.
Remises en cause de mesures sur l’environnement
Outre les rendez-vous de Matignon, les deux ministres chargés de l’agriculture « verront dans la semaine chacune des organisations syndicales », notamment pour évoquer le projet de loi sur le renouvellement des générations, a-t-on précisé lundi au cabinet de Marc Fesneau. Ce texte, reporté pour être enrichi, selon le gouvernement, devrait être présenté en conseil des ministres « à la fin du mois de février » pour un vote « d’ici le mois de juin ».
Parmi les sujets urticants, tant pour les agriculteurs que pour les défenseurs de l’environnement, figure aussi le suivi des usages de pesticides, remis sur la table lundi. Huit ONG environnementales ont annoncé avoir quitté une réunion du comité d’orientation stratégique et de suivi (COS) du plan Ecophyto, qui s’est tenue au ministère de l’agriculture, avec le gouvernement, des élus et des représentants des agriculteurs et de l’industrie.
La Commission européenne a, de son côté, adopté mardi, pour l’année 2024, une exemption partielle des obligations de jachères prévues par la politique agricole commune (PAC), une revendication-clé des récentes manifestations agricoles.
Ce plan, qui vise une réduction de moitié de l’utilisation des pesticides d’ici à 2030 (par rapport à 2015-2017), a été suspendu par M. Attal « le temps de mettre en place un nouvel indicateur » qui remplacerait le NODU, principal outil de mesure français. Une décision qui a satisfait les syndicats agricoles majoritaires et consterné les associations environnementales.
Pour toucher les aides de la PAC, les agriculteurs devront désormais laisser au moins 4 % des terres arables en cultures intermédiaires ou fixatrices d’azote (lentilles, pois…) et non plus seulement en jachères et surfaces non productives (haies, bosquets, mares…), selon une décision publiée mardi au Journal officiel. Ce seuil a par ailleurs été abaissé par rapport à 7 %, initialement proposé à la fin de janvier.