Depuis le 24 novembre, Izvorani, petite commune résidentielle située à cinquante kilomètres au nord de Bucarest, est le centre de la vie politique roumaine. Isolées à l’écart du village, deux discrètes villas modernes aux façades peintes en noir et entourées d’un haut mur abritent la campagne du phénomène politique le plus mystérieux des vingt dernières années dans le pays : Calin Georgescu, 62 ans, candidat d’extrême droite prorusse, arrivé à la surprise générale en tête du premier tour de l’élection présidentielle, avec près de 23 % des voix.
C’est dans ce lieu discret que cet ancien haut fonctionnaire, qui s’affiche en homme d’Etat respectable, avec ses cheveux gris et ses costumes impeccables, préparait ses apparitions médiatiques en vue du second tour, initialement prévu le 8 décembre avant que la Cour constitutionnelle de Roumanie n’annule vendredi 6 décembre le scrutin et en ordonne un autre.
Devenu en quelques semaines une vedette de TikTok grâce à une mystérieuse opération jugée par les services de sécurité roumains « très similaire » à celles que mène la Russie, M. Georgescu multiplie les interviews avec la presse occidentale, dont Le Monde, avec qui il s’est entretenu au téléphone, mercredi 4 décembre, pendant une quinzaine de minutes.
A quelques jours du second tour, il semble avoir désormais pour objectif de rassurer les partenaires occidentaux de la Roumanie, alors que les sondages le donnent vainqueur, dimanche, et qu’il a promis de mettre fin au fort soutien accordé jusqu’ici par son pays à l’Ukraine. S’il ne réitère plus ses déclarations d’admiration pour le président russe, Vladimir Poutine, faites dans le passé, et ne menace plus de faire sortir son pays de l’Alliance atlantique (OTAN) ou de l’Union européenne, M. Georgescu continue néanmoins de marteler que « la guerre en Ukraine doit s’arrêter ».
Tournant géopolitique
Refusant de détailler sa méthode pour y parvenir, il se contente d’affirmer qu’il compte mener une « politique fortement liée au [président américain élu] Donald Trump », et promet que les importantes livraisons d’armes « doivent cesser ». En cas d’accès à la présidence lors d’un prochain scrutin, ce pays de dix-neuf millions d’habitants, qui partage 600 kilomètres de frontière avec l’Ukraine, alignerait ainsi sa politique étrangère sur celle du premier ministre hongrois, Viktor Orban, vis-à-vis duquel M. Georgescu ne cache pas son admiration.
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