Elon Musk et le gouvernement australien sont au moins d’accord sur un point : leurs joutes verbales n’ont pas besoin de s’embarrasser des faux-semblants de la bienséance. Vendredi 13 septembre, le ministre des services publics, Bill Shorten, a accusé le propriétaire du réseau social X d’avoir, à propos de la liberté d’expression, « davantage de positions que n’en a le Kama-sutra ». La veille, le milliardaire avait qualifié, dans un post, les décideurs australiens de « fascistes ». Rien de moins.
Le ton est monté après que Canberra a présenté, le 12 septembre, un projet de loi pour lutter contre la désinformation. Ce texte prévoit que l’Australie imposera aux plates-formes Internet des amendes pouvant atteindre 5 % de leur chiffre d’affaires annuel si elles ne parviennent pas à empêcher la propagation de fausses nouvelles en ligne. Cette initiative vise à protéger la santé publique, la sécurité des citoyens et l’intégrité des élections. Les prochaines législatives doivent se tenir d’ici à la fin mai 2025.
Evoquant une « responsabilité sociale » des réseaux, le chef du gouvernement travailliste, Anthony Albanese, a déclaré, samedi : « Si M. Musk ne comprend pas cela, cela en dit plus sur lui que sur mon gouvernement. » Réplique immédiate du milliardaire : « Les fascistes d’extrême gauche adorent la censure. »
Lors du dernier scrutin fédéral australien – un référendum organisé, en octobre 2023, pour demander aux électeurs de se prononcer sur la reconnaissance constitutionnelle des Aborigènes et des insulaires du détroit de Torres, à travers la création d’un organe consultatif, et où le « non » était sorti gagnant –, les rumeurs les plus folles s’étaient propagées sur les réseaux sociaux, distillant la peur et le doute chez les citoyens. En quelques mois de campagne, l’opinion publique s’était retournée.
« Préserver un certain degré de cohésion sociale »
« Ce n’est évidemment pas le seul facteur qui explique les résultats du référendum, loin de là, mais ces plates-formes ont sans aucun doute un impact », précise Terry Flew, professeur de communication et de culture numérique à l’Université de Sydney. « Il est intéressant de noter que, dans cette loi, ce n’est pas le caractère factuel ou non d’une information qui est déterminant, mais plutôt le fait qu’elle cause un préjudice ou pas à une partie de la communauté. Par conséquent, ces mesures doivent être perçues non pas comme une tentative de contrôler la vérité, si l’on peut dire, mais plutôt comme un moyen de préserver un certain degré de cohésion sociale face à des environnements en ligne souvent très polarisants », ajoute l’universitaire.
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