
L’Etat et les différentes composantes politiques de Nouvelle-Calédonie, réunis depuis dix jours près de Paris pour tenter de tracer l’avenir institutionnel du territoire, ont conclu un accord « historique », samedi 12 juillet au matin, ont annoncé plusieurs participants. Cet accord, obtenu au terme d’une ultime nuit de négociations à Bougival (Yvelines), où les représentants néo-calédoniens étaient réunis depuis le 2 juillet, doit encore être entériné en Nouvelle-Calédonie par les mouvements représentés.
Après avoir salué un « accord historique actant un « Etat de Nouvelle-Calédonie » et une victoire du « pari de la confiance », Emmanuel Macron a reçu les signataires en début de soirée samedi à l’Elysée, en présence du premier ministre, François Bayrou, du ministre des outre-mer, Manuel Valls et des présidents des deux chambres, Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher, très impliqués dans le processus.
« Après deux accords et trois référendums, la Nouvelle-Calédonie, par ce que vous avez signé, ouvre une nouvelle page de son avenir dans un lien serein avec la France », a déclaré le chef de l’Etat martelant à plusieurs reprises à l’adresse de ses interlocuteurs calédoniens : « vous avez bien fait ».
François Bayrou a lui exprimé sa « fierté d’un accord à hauteur d’Histoire » pour l’avenir de ce territoire à 17 000 kilomètres de l’Hexagone. Manuel Valls a pour sa part salué « le choix du courage et de la responsabilité ». Dans une réaction transmise à l’Agence France-Presse (AFP), il a évoqué un « engagement majeur, fruit d’un long travail de négociations ».
Les non-indépendantistes des Loyalistes et du Rassemblement ont salué « un accord historique [qui] a été signé », dans un communiqué. Ils ont assuré qu’il permettra « la réouverture du corps électoral à de nombreux Calédoniens ». Ils ont salué, en outre, que « ce choix respecte la volonté souveraine exprimée par les Calédoniens » lors des trois référendums d’indépendance de 2018, 2020 et 2021 et ont évoqué des « concessions », avec « la transformation de la collectivité Nouvelle-Calédonie en Etat intégré dans l’ensemble national ».
« Se mettre à l’épreuve de la critique » dans l’archipel
« C’est signé. Un statut dans la France. Avec des Calédoniens qui restent Français. Plus aucun référendum en vue si ce n’est celui qui sera organisé pour valider cet accord. Une ouverture du corps électoral », a dit le député non-indépendantiste Nicolas Metzdorf, dans une réaction transmise à l’AFP. « On nous avait prédit un référendum sur l’Etat-associé dans quinze ans. Nous avons fait de fortes concessions pour l’éviter et pour projeter définitivement la Nouvelle-Calédonie dans l’avenir et sans date butoir », a-t-il poursuivi.
Reçus à l’Elysée, tous les signataires ont confié que le projet d’accord serait délicat à défendre dans l’archipel. Le député Emmanuel Tjibaou (GDR), qui conduisait la délégation FLNKS, s’attend à « se mettre à l’épreuve de la critique ». Même tonalité côté Loyaliste et Rassemblement-LR, où l’on salue « un accord historique » en mesure « d’instaurer une nouvelle ère de stabilité », mais qui va devoir être défendu et accepté sur le Caillou. « Ça va bouger sur place, il va falloir être extrêmement solide », pour « rester sur les rails » de l’accord, a estimé M. Metzdorf.
Newsletter
« Politique »
Chaque semaine, « Le Monde » analyse pour vous les enjeux de l’actualité politique
S’inscrire
« Cet accord permet à l’espoir de renaître », s’est, quant à lui, félicité Philippe Gomes, chef de file du parti Calédonie ensemble, auprès de l’AFP. Le Parlement doit, selon lui, se réunir en congrès à Versailles au dernier trimestre pour « constitutionnaliser » l’accord, avant un référendum local. Les élections provinciales prévues au plus tard fin novembre dans l’archipel sont reportées.
Un Etat de Nouvelle-Calédonie
Un des points de l’accord stipule que le corps électoral local sera ouvert aux résidents en Nouvelle-Calédonie depuis au moins dix ans à partir des élections provinciales de 2031, alors que la réforme du corps électoral avait été à l’origine des émeutes de mai 2024, qui a causé la mort de 14 personnes.
Intitulé le « pari de la confiance », les 13 pages du projet d’accord, consulté par l’AFP et Le Monde, actent la reconnaissance d’un « Etat de la Nouvelle-Calédonie » inscrit dans la Constitution française. Une nationalité calédonienne sera créée, et cet Etat pourra être reconnu par la communauté internationale. Une loi fondamentale sera également adoptée par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie, qui consacrera sa capacité d’auto-organisation. Cela ne signifie pas que la Nouvelle-Calédonie disposera d’un siège à l’ONU.
L’accord aborde l’économie avec un futur « pacte de refondation économique et financière » qui prévoit notamment un « plan stratégique » pour le nickel, ressource-clé du territoire, mais reste vague dans les ambitions et les termes. Une fois validé par la base en Nouvelle-Calédonie, le texte prévoit l’adoption à l’automne d’une loi organique reportant les élections provinciales – déterminantes pour la composition du Congrès et du gouvernement local – à juin 2026.
Suivra un projet de loi constitutionnelle, modifiant le titre XIII de la Constitution relatif à la Nouvelle-Calédonie, qui devra être adopté par le Parlement réuni en Congrès. Les Calédoniens seront ensuite appelés à se prononcer sur l’accord lors d’un référendum, prévu en février 2026.