Hossam continue d’être hanté par les images du naufrage survenu dans la nuit du 13 au 14 juin au large de Pylos, en Grèce : ces corps inanimés flottant à la surface de l’eau, la panique, les cris et la peur de mourir. Le jeune Egyptien avait entrepris cette traversée avec Ahmed, son cousin de 27 ans. Tous les deux avaient vendu leurs bijoux, leurs voitures, le commerce qu’ils tenaient ensemble pour pouvoir payer les passeurs qui devaient les emmener en Italie depuis la Libye. Il assure qu’ils ont déboursé chacun près de 4 500 euros.
Sur le chalutier Adriana, où ils sont restés pendant cinq jours, se trouvaient également quelque 750 exilés syriens, pakistanais, égyptiens et palestiniens. Seules 104 personnes ont survécu et 82 cadavres ont été retrouvés.
Avec plus de 500 morts, ce drame est l’un des naufrages les plus meurtriers survenu en Méditerranée dans des circonstances troubles : les secours grecs ont tardé à venir les aider, et le remorquage du bateau avec une corde par les gardes-côtes a été à l’origine du chavirement de l’embarcation d’après les témoignages des survivants.
« Les gardes-côtes n’intervenaient pas »
« Les gardes-côtes ne sont arrivés qu’en pleine nuit, ils ont attaché une corde pour s’approcher de notre embarcation mais, soudain, leur navire a commencé à aller de gauche à droite en créant des vagues, et notre bateau s’est renversé. Je voyais les gardes-côtes qui n’intervenaient pas, ne jetaient pas de gilets de sauvetage, et je me suis dit que le seul moyen de me sauver était de nager jusqu’à eux », se rappelle Hossam. Ahmed, lui, ne savait pas nager. Alors quand Hossam a fini par retrouver son ami vivant, il a pleuré de joie.
Mais le cauchemar n’était pas fini. En moins de vingt-quatre heures, Ahmed a été accusé, avec huit autres Egyptiens, d’être l’un des passeurs. Les neuf migrants, âgés de 21 à 37 ans, sont poursuivis pour « appartenance à une organisation criminelle », pour « avoir facilité l’entrée illégale de migrants sur le territoire grec » et avoir « causé un naufrage ». Ils encourent la perpétuité. Mardi 21 mai, leur procès s’ouvre à Kalamata, dans le sud de la Grèce.
« Mon cousin n’était ni le capitaine du bateau, qui a été retrouvé mort, ni un passeur. Il a payé, comme moi, pour faire ce périple. Mais certains réfugiés ont été forcés par la police de désigner des coupables. Maintenant, ils sont en Allemagne, et j’essaie de les persuader de venir témoigner au tribunal… Mais ils ont peur », explique Hossam.
Criminalisation des exilés
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