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Eric Ambler pourchasse l’espion dans une Europe crépusculaire

by Marko Florentino
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Peter Lorre et Sydney Greenstreet dans « Le Masque de Dimitrios », de Jean Negulesco (1944).

« Le Masque de Dimitrios » (The Mask of Dimitrios), d’Eric Ambler, traduit de l’anglais par Gabriel Veraldi, révisé par Patricia Duez, L’Olivier, 320 p., 22 €, numérique 16 €.

Au grand banquet des seigneurs du thriller et des moguls du roman d’espionnage, parmi vétérans et prétendants, le Britannique Eric Ambler (1909-1998) s’impose, médusant, comme la statue du Commandeur. Mais d’un Commandeur « classe affaires », affable, inflexible, qui vous chronique l’enfer d’un cercle l’autre, plus qu’il ne cherche à vous y propulser, laissant cette tâche aux monstres voraces sillonnant ses romans pièges. D’aussi minces experts en suspense et artisans de la terreur qu’Alfred Hitchcock, John le Carré ou Graham Greene ont respectivement jugé ses « qualités originales et admirables », vu en lui un « maître » et déclaré tout de go : « Ambler est sans conteste notre plus grand auteur de thrillers. »

Eric Ambler, qui fit carrière en tant que scénariste à Hollywood, où il épousa une assistante de l’auteur de Psychose, a depuis toujours en France d’« honorables correspondants » qui n’ont cessé de le hisser sur le pavois, diffusant au mieux ses romans : son traducteur et exégète François Rivière (qui le publia dès 1978) et Olivier Cohen, amblérien de vieille ­roche, homme qui « a connu le maître » (Stevenson) et directeur de L’Olivier, maison qui nous offre, en traductions révisées et textes enfin intégraux, quatre de ses plus hauts faits d’armes : Le Masque de Dimitrios (1939), qui paraît aujourd’hui, en attendant Je ne suis pas un héros (1938 ; parution le 12 avril) et, en 2025, La Croisière de l’angoisse (1940) et Les Trafiquants d’armes (1959).

Doit-on expliquer le goût de l’auteur pour la manipulation et l’illusion par le fait que les parents Ambler étaient marionnettistes et artistes de music-hall, justifier son goût de l’espionnage industriel par ses études d’ingénieur, en 1928, à l’université de Londres, et l’errance de ses personnages par ses précoces voyages ? Sans doute pas. Pas plus que son passage dans la publicité ne préfigure son entrée en littérature, à 27 ans, en 1936, avec Frontières des ténèbres (Les Humanoïdes associés, 1978), récit fantasque de la détention par un petit pays balkanique des secrets de fabrication de la bombe atomique. En 1938, Je ne suis pas un héros (Les Presses de la Cité, 1950), son quatrième roman, met en scène les affres morales et la prise de risques d’un jeune ingénieur anglais confronté au double jeu et aux trafics transfrontaliers de marchands d’armes italiens. Mais c’est en 1939, l’année du pacte germano-soviétique, outrageant scandale pour l’antifasciste Ambler, qu’il fait son coup d’éclat avec Le Masque de Dimitrios, roman qui, adapté à Hollywood en 1944 (par Jean Negulesco, un des films préférés de Jorge Luis Borges), reste une aventure de lecture fascinante.

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