
Au lendemain de sa victoire aux élections législatives, le futur chancelier allemand, Friedrich Merz, a déclaré lundi 24 février vouloir se préparer au « pire scénario » dans les relations transatlantiques en matière de défense, constatant que l’administration Trump se détourne de l’Europe. « Tous les signaux que nous recevons en provenance des Etats-Unis indiquent que l’intérêt pour l’Europe faiblit de manière significative », a dit le chef de file des conservateurs.
Dans ce contexte, il est nécessaire « de faire face au pire scénario si ceux qui, aux Etats-Unis, ne parlent pas seulement de “America first” mais presque de “America alone”, prennent le dessus », a ajouté Friedrich Merz en disant en anglais « l’Amérique d’abord » et « l’Amérique toute seule ». Car, dans ce cas, « cela deviendrait difficile », a-t-il précisé. Il « est clair que (…) les Européens doivent très rapidement organiser leur capacité de défense, c’est une question qui aura une priorité absolue dans les prochaines semaines ».
Friedrich Merz a dit être sur ce sujet « en accord complet » avec Emmanuel Macron, avec qui il a parlé au téléphone dimanche, avant le départ pour Washington du chef de l’Etat français. Emmanuel Macron veut présenter lundi des « propositions d’action » à Donald Trump pour conjurer la « menace russe » en Europe et garantir une « paix durable » en Ukraine qui ne vire pas au diktat pour Kiev en plein rapprochement russo-américain.
Dans le même temps, le futur chancelier allemand a dit garder espoir de pouvoir convaincre l’administration américaine que la préservation d’une « bonne relation transatlantique » est « d’un intérêt commun ». Il a ajouté vouloir tout mettre en œuvre en ce sens.
« Le monde ne nous attend pas »
En parallèle de ces déclarations, Friedrich Merz a lancé lundi les grandes manœuvres pour former avec ses rivaux sociaux-démocrates un gouvernement afin de peser face aux Etats-Unis et la Russie, mais aussi de stopper l’essor de l’extrême droite dans le pays.
« Je suis déterminé à tenir des discussions constructives, bonnes et rapides avec les sociaux-démocrates », a assuré celui qui se donne deux mois, jusqu’à Pâques, pour surmonter les divergences, notamment budgétaires, entre les deux partis et doter la première économie européenne d’« un gouvernement efficace ». « Le monde ne nous attend pas, les choses continuent de changer rapidement », a martelé le futur chancelier.
Ayant annoncé qu’il ne s’allierait pas avec le parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne (AfD), qui a doublé son score (20,8 %), Friedrich Merz (28,6 %) n’a d’autre choix que de tendre la main à des sociaux-démocrates aux abois : avec un score autour de 16 %, le SPD, plus vieux parti du pays, encaisse son plus mauvais résultat en quatre-vingts ans.
Les deux formations (sociaux-démocrates et conservateurs) contrôleraient ensemble 328 des 630 sièges du nouveau Bundestag. Mais le fossé entre les deux partis s’est creusé depuis que Friedrich Merz, ancien rival d’Angela Merkel, s’est affranchi de sa ligne centriste, revendiquant une droite sans tabou, aux propositions radicales pour lutter contre l’immigration illégale.
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Bien qu’affaiblis, les sociaux-démocrates devraient négocier chèrement ce mariage de raison en faisant monter les enchères sur une réforme des règles d’endettement nationales, sujet le plus épineux entre les deux partis. Les sociaux-démocrates réclament d’assouplir ce carcan, auxquels ils ont longtemps adhéré, jugeant qu’il y a urgence à investir pour relancer l’économie du pays, en récession depuis deux ans, et à augmenter les dépenses militaires.
Mais casse-tête supplémentaire : avec l’affaiblissement des partis modérés, les législatives ont donné une minorité de blocage à l’AfD et au parti d’extrême gauche Die Linke, qui a créé la surprise avec un score de 8,7 %.