
La présidente du conseil national conservatrice Giorgia Meloni en a fait la « mère de toutes les réformes ». Objectif politique majeur de son mandat, la réforme des institutions est censée porter une transformation radicale des équilibres constitutionnels italiens au profit du chef de l’exécutif. Pour ses détracteurs, elle induirait une concentration des pouvoirs inédite dans l’histoire républicaine, voire une dérive illibérale susceptible de contraster avec l’image policée que la dirigeante venue du post-fascisme a, jusqu’à présent, projetée dans ses engagements européens et internationaux.
Approuvé en première lecture le 18 juin par le Sénat, le texte prévoit, selon une formule unique au monde, l’élection du président du conseil des ministres au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans, en même temps que les élections législatives. Vainqueur des élections, le parti ou la coalition du chef de l’exécutif élu se verrait garantir une majorité absolue des sièges au Parlement sans qu’un seuil ait été pour l’instant défini, une loi électorale aux contours encore inconnus devant suivre. Un parti ayant remporté moins de 50 % des voix mais arrivé en tête pourrait ainsi, théoriquement, obtenir plus de la moitié des sièges, selon le nouveau système qui instituera une prime de majorité.
Pour Mme Meloni, il s’agit notamment de rompre avec deux singularités de la vie publique italienne. D’abord, la réforme empêcherait les changements de majorité en cours de législature, un président du conseil perdant la confiance des parlementaires pouvant demander la dissolution du Parlement. Ensuite, le texte affaiblirait considérablement le rôle du président de la République, face à un président du conseil drapé dans sa légitimité populaire.
Perspective d’un référendum
Force modératrice, garant des valeurs de la Constitution et référence morale, le chef de l’Etat a actuellement son mot à dire sur la nomination des ministres et peut assurer, en cas de crise, la fonction de « moteur de réserve de la République », selon l’expression du constitutionnaliste Francesco Clementi. Il a pu ainsi nommer des chefs de gouvernement dits « techniques » pour faire face à des circonstances exceptionnelles. Ce fut le cas lors de la pandémie de Covid-19 avec l’ancien gouverneur de la Banque centrale européenne Mario Draghi appelé à la rescousse en 2021 par le président actuel, Sergio Mattarella, et aussi avec l’ancien commissaire européen, Mario Monti, au moment de la crise financière de 2011, sous la présidence de Giorgio Napolitano.
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