Israël a mis sa menace à exécution, vendredi 2 mai, en bombardant les abords du palais présidentiel à Damas, affirmant agir en représailles des combats ayant affecté la communauté druze de Syrie. A l’aube, « des avions de combat ont frappé les environs du palais », a annoncé l’armée israélienne sur la messagerie Telegram.
Jeudi, le chef de la minorité druze, protégée par le pouvoir israélien, avait accusé le pouvoir du nouveau président syrien, Ahmed Al-Charaa, de « génocide », réclamant « une intervention immédiate de forces internationales », après des affrontements confessionnels ayant fait plus de 100 morts. Israël, voisin de la Syrie, avait aussitôt menacé de répondre « avec force » si Damas ne protégeait pas cette minorité religieuse.
« C’est un message clair envoyé au régime syrien. Nous ne permettrons pas que des forces [syriennes] soient dépêchées au sud de Damas ou menacent de quelque manière que ce soit la communauté druze », ont affirmé, dans un communiqué publié en anglais par le journal Times of Israel, le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, et son ministre de la défense, Israel Katz.
Vendredi, la présidence syrienne a condamné la frappe aérienne israélienne, la qualifiant de « dangereuse escalade contre les institutions et la souveraineté de l’Etat ». Elle a appelé la communauté internationale à soutenir la Syrie, affirmant que de telles attaques « visent la sécurité nationale syrienne et l’unité du peuple syrien ».
« Quatre combattants druzes ont été tués dans une ferme à Kanaker dans une explosion coïncidant avec un survol de drone », a par ailleurs déclaré vendredi soir l’Observatoire syrien des droits de l’homme, sans préciser qui avait mené la frappe. L’agence officielle syrienne SANA, citant la page Telegram de la province de Souweïda, a affirmé de son côté que « quatre personnes avaient été tuées dans une frappe israélienne ». La frappe n’a pour l’heure pas été revendiquée.
Des combats cette semaine à Jaramana et Sahnaya, dans la banlieue de Damas, où vivent des chrétiens et des Druzes, ainsi qu’à Souweïda, ville à majorité druze du sud du pays, ont réveillé le spectre des massacres qui avaient fait, au début de mars, plus de 1 700 morts, en grande majorité des membres de la minorité alaouite, dans l’ouest du pays. Ces heurts entre combattants druzes et groupes armés liés au pouvoir sunnite du président Ahmed Al-Charaa illustrent l’instabilité persistante en Syrie, près de cinq mois après le renversement de son prédécesseur, Bachar Al-Assad, issu de la minorité alaouite.
Israël avait déjà mené des frappes, mercredi, dans la région de Sahnaya. Benyamin Nétanyahou et Israel Katz avaient affirmé qu’il s’agissait d’« une action d’avertissement » contre un « groupe extrémiste qui se préparait à attaquer la population druze de Sahnaya ». « Si les attaques contre les Druzes reprennent et que le régime syrien ne parvient pas à les empêcher, Israël répondra avec une force significative », avait alors prévenu M. Katz dans un communiqué.
L’ONU appelle à la retenue
L’armée israélienne avait annoncé que ses forces étaient prêtes à frapper des cibles du pouvoir syrien si « la violence contre la communauté druze persistait ». Elle a, en outre, affirmé avoir évacué vers Israël trois Druzes syriens blessés dans les heurts.
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L’Organisation des Nations unies (ONU) a exhorté « toutes les parties à faire preuve d’un maximum de retenue », et son secrétaire général, Antonio Guterres, a « condamné » la frappe, appelant Israël à « respecte[r] la souveraineté, l’unité, la territoriale intégrité et l’indépendance de la Syrie ». La diplomatie américaine a fustigé « les dernières violences et la rhétorique incendiaire » antidruzes « répréhensibles et inacceptables ». De son côté, l’Allemagne s’est dite « profondément préoccupée » par les « affrontements violents » des derniers jours en Syrie et appelé le gouvernement syrien à assurer « la protection de la population civile ». Le ministère des affaires étrangères a, lui, évoqué une « agression flagrante contre la souveraineté » de la Syrie.
Les Druzes sont une minorité de l’islam chiite. Ses membres sont répartis entre le Liban, la Syrie et Israël. « Nous sommes une partie inaliénable de la Syrie », a rappelé un porte-parole du rassemblement des autorités religieuses, chefs traditionnels et groupes armés druzes à Souweïda, ajoutant que la communauté rejetait « toute division » du pays.
Les combats en Syrie ont été déclenchés, lundi soir, par une attaque de groupes armés affiliés au pouvoir contre Jaramana, après la diffusion sur les réseaux sociaux d’un message audio attribué à un Druze et jugé blasphématoire à l’égard du prophète Mahomet. L’Agence France-Presse n’a pas pu vérifier l’authenticité du message. Les autorités syriennes ont accusé des éléments échappant à son contrôle d’avoir provoqué les violences.
Selon un bilan de l’Observatoire syrien des droits de l’homme, ces affrontements ont fait 102 morts, dont 30 membres des forces de sécurité et combattants affiliés, 21 combattants druzes et 11 civils à Jaramana et Sahnaya. Dans la province de Souweïda, dans le Sud, 40 combattants druzes ont péri, dont 35 dans une embuscade, d’après l’ONG.