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Il y a deux ans, le romancier Alain Damasio, sa compagne et leurs deux filles se sont installés avec quatre autres adultes dans les Alpes-de-Haute-Provence pour y monter un écolieu, l’Ecole des vivants. L’endroit vit d’activités agricoles et d’ateliers de formation. Ses adolescentes de 16 et 13 ans trouvent tout cela stimulant quoique un peu saturé de gens qui passent pour les stages de cirque, les ateliers d’écriture, les résidences en immersion, jusqu’à cet atelier « habiter en oiseau », prévu en octobre.
Pourtant, l’écrivain de 54 ans conclut son essai paru en avril, Vallée du silicium (Seuil, 336 pages, 20 euros), dans lequel il raconte son séjour à San Francisco (Californie), ses rencontres et ses interrogations, en le dédiant à ses filles qui « vivent déjà dans la Silicon Valley sans le savoir ». Parce que même à 1 300 mètres d’altitude en pleine nature, un auteur de science-fiction peut, comme tous les parents, avoir du mal à arracher des ados de leurs écrans.
La première fois que vous vous êtes senti père ?
Au moment où je me suis décidé à dire à ma compagne que j’aimerais qu’on ait des enfants ensemble. Je sentais que c’était la bonne personne et j’ai fait une demande en enfants comme on ferait une demande en mariage.
Avez-vous déjà pleuré devant vos filles ?
Oui, plusieurs fois, en regardant des films ensemble, des histoires d’amour souvent. Je me mets à leur place et je les regarde avec leurs yeux. Et dans les moments d’émotion, je pleure de joie.
La pire chose que vous ayez dite à vos filles ?
Je n’ai pas l’impression de dire des choses très graves. Mais l’autre fois, on était en voiture, je me suis retrouvé dans un champ à galérer et je leur ai dit « vous ne pouvez pas bouger votre cul ? » ou quelque chose comme ça. Elles ont réagi tout de suite, « tu n’as pas à nous parler comme ça ! », elles n’ont pas subi du tout et je trouve ça très bien.
La pire chose qu’elles vous aient dite ?
C’était à un anniversaire ou à la Fête des pères. La grande a dit : « Bon, on ne t’a pas beaucoup vu cette année, j’espère qu’on te verra plus… » Tout ça, je ne l’avais pas mesuré. Je me croyais présent parce qu’elles sont présentes dans ma tête. Une autre fois, j’avais dû râler en disant qu’il n’y avait rien à manger chez nous (comme on vit dans un écolieu, on a pas mal d’obligations et parfois moins le temps de faire la cuisine qu’avant). Evidemment, ma compagne a réagi, je me suis énervé, et ma fille m’a dit : « C’est complètement sexiste ce que tu dis ! » Ces jugements, tu les prends dans la gueule, mais c’est génial le moment où l’on sent que les enfants acquièrent du recul, une vision.
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