Après l’attaquant Marcus Thuram, la veille, le capitaine de l’équipe de France, Kylian Mbappé, s’est engagé dans la bataille des élections législatives, dimanche 16 juin, lors d’une conférence de presse à Düsseldorf (Allemagne), à la veille du premier match de l’équipe de France dans l’Euro 2024, contre l’Autriche.
« Je pense qu’on est dans un moment crucial de l’histoire de notre pays, a énoncé Mbappé dès le début de sa prise de parole. Il faut savoir faire la part des choses et avoir le sens des priorités : l’Euro a une place très importante dans nos carrières, mais on est des citoyens avant tout, et je pense qu’on ne doit pas être déconnectés du monde qui nous entoure, et encore moins quand ça concerne notre pays. » Il s’agissait, pour le capitaine des Bleus, de corriger certaines prises de parole de ses coéquipiers plus tôt dans la semaine, qui avaient pu paraître déconnectées de la situation politique française et de sa gravité.
Par la suite, plusieurs joueurs avaient rectifié le tir en incitant à aller voter, avant que Marcus Thuram ne s’engage de façon beaucoup plus marquée, samedi, appelant à « se battre pour que le Rassemblement national [RN] ne passe pas ». Un message salué principalement à gauche, et qui a suscité des réactions irritées côté RN, telle celle du porte-parole, Julien Odoul, sur X : « Le citoyen Marcus n’a jamais dit un mot pour exprimer sa tristesse quand Thomas, Lola et toutes les autres jeunes victimes ont été massacrées par la racaille. Ras-le-bol de ces donneurs de leçon privilégiés qui prennent les Français pour des imbéciles ! »
Une initiative commune « très bientôt »
Samedi soir, dans un communiqué, la Fédération française de football (FFF) a tenté de recadrer les choses en « s’associ[ant] au nécessaire appel à aller voter », tout en « souhait[ant] que soit comprise et respectée par tous sa neutralité (…) ainsi que celle de la sélection », suggérant que le joueur s’était écarté de ce principe.
Dimanche, Kylian Mbappé est resté fidèle à l’esprit de ce communiqué, puisqu’il n’a mentionné explicitement ni le RN ni aucune autre force politique. Mais il a expliqué « partager les mêmes valeurs que Marcus [Thuram] » et « [s]e range[r] avec lui ». Avant de faire clairement référence au scrutin législatif à venir et à la menace d’une victoire de l’extrême droite : « J’espère qu’on va faire le bon choix et j’espère qu’on sera encore fier de porter ce maillot le 7 juillet. (…) Je suis contre les extrêmes, contre les idées qui divisent. (…). Je n’ai pas envie de représenter un pays qui ne correspond pas à nos valeurs. Je pense et j’espère qu’on est tous dans le même cas. »
Une telle prise de position n’est pas sans précédent en équipe de France. Avant le second tour de la présidentielle de 2002, auquel avait accédé Jean-Marie Le Pen, les « joueurs de l’équipe de France » avaient publié un communiqué – sans mention du nom des signataires – pour condamner « les notions résurgentes d’exclusion et de racisme » et jugé « intolérables et indéfendables des attitudes dangereuses pour la démocratie comme pour les libertés, particulièrement dans une France multiethnique et multiculturelle et justement riche de ses diversités ». Plusieurs d’entre eux s’étaient aussi exprimés individuellement.
Au-delà de son intervention, Kylian Mbappé a annoncé une initiative commune des joueurs français « très bientôt », notamment « pour protéger les plus jeunes », (…) « qu’ils ne vous donnent pas l’impression qu’ils s’en foutent, parce qu’il n’y a personne qui s’en fout dans l’équipe ».