
Le 14 novembre 2023, à quelques pas du château de Clairefontaine, dans les Yvelines, où les joueurs de l’équipe de France préparent l’Euro (du 14 juin au 14 juillet, en Allemagne), le Centre national du football (CNF) fourmille. Les invités, connus ou non, ont tous pour point commun d’être passé par l’Institut national du football, l’école de formation réputée, fondée en 1972 à Vichy (Allier) puis délocalisée en 1988 à Clairefontaine-en-Yvelines à la création du CNF.
En ce jour d’automne, la Fédération française de football (FFF) célèbre, avec quelques mois de retard, les cinquante ans du modèle de formation à la française, en compagnie de ses anciens pensionnaires, qu’ils aient eu la chance de suivre une carrière professionnelle ou non. L’un des plus illustres élèves de l’Institut national du football, Kylian Mbappé, fait partie des invités de prestige de cette journée et vient témoigner de ses deux années de formation, entre ses 12 ans et ses 14 ans.
Comme le capitaine de l’équipe de France, qui a rejoint par la suite l’AS Monaco, la grande majorité des 25 Bleus retenus pour disputer l’Euro ont très tôt été placés sur les rails du succès. A 15 ans, seuls trois d’entre eux – N’Golo Kanté, Youssouf Fofana et Randal Kolo Muani – n’étaient pas membres d’un des 37 centres de formation répartis dans l’Hexagone.
« On se débrouillait tout seul »
En 1984, lorsque les Bleus de Michel Hidalgo remportaient l’Euro 1984, ces infrastructures étaient encore peu nombreuses sur le territoire, les recruteurs moins présents qu’aujourd’hui. La formation française n’en était qu’à ses balbutiements et seulement quelques centres de formation avaient émergé, dans le sillage du premier d’entre eux, celui du FC Sochaux, en 1974. Seuls quelques joueurs de la sélection tricolore avaient eu la chance d’en bénéficier.
« A notre époque, le plus gros club de la région enrôlait les joueurs des petits clubs à proximité », témoigne Manuel Amoros. Les débuts du champion d’Europe 1984 dans le monde professionnel constituent, cependant, une exception, qui préfigurera les évolutions à venir, avec des jeunes joueurs déracinés et envoyés dans des clubs à plusieurs centaines de kilomètres de leur domicile familial. Originaire de Lunel (Hérault), Manuel Amoros ne convainc pas Nîmes, l’équipe phare du coin, et rejoint, en 1977, l’AS Monaco qui vient d’ouvrir son centre de formation.
Les configurations des clubs, qui se doteront quelques années plus tard d’infrastructures adaptées, ne permettent pas encore de loger les apprentis. Agé de 15 ans, Manuel Amoros réside donc à l’hôtel avec cinq de ses coéquipiers. D’autres vivent chez l’habitant. « On nous lâchait dans la nature à Monaco, et on se débrouillait tout seul, se remémore l’ex-défenseur. Il fallait être costaud psychologiquement pour faire abstraction de tout ce qui se passait à côté. »
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