
La garde à vue de Philippe Vedovini, grand-père du petit Emile, entendu pour « homicide volontaire » et « recel de cadavre » dans l’enquête sur la disparition du garçonnet en juillet 2023, a été prolongée de vingt-quatre heures, a annoncé son avocate, dans la nuit du mardi 25 au mercredi 26 mars.
Les grands-parents, un oncle et une tante de l’enfant avaient été interpellés, mardi, par les enquêteurs de la section de recherches de la gendarmerie de Marseille. Il s’agit d’une brusque accélération dans l’enquête qui n’avait enregistré aucune annonce significative depuis la découverte il y a tout juste un an d’ossements du petit garçon de 2 ans et demi. Ce dernier avait disparu il y a plus d’un an et demi alors qu’il était en vacances dans la maison de campagne familiale dans les Alpes-de-Haute-Provence.
Me Isabelle Colombani, l’avocate de Philippe Vedovini, a annoncé la prolongation de la garde à
vue de son client devant la gendarmerie à Marseille, vers minuit, au sortir d’une troisième audition de son client. Il avait initialement été placé en garde à vue pour vingt-quatre heures. M. Vedovini avait été interpellé avec son épouse et deux de leurs enfants majeurs tôt mardi matin à La Bouilladisse (Bouches-du-Rhône), où le couple réside avec plusieurs de ses enfants.
Son épouse, Anne, « continuera à se soumettre » aux questions des enquêteurs, avait déclaré peu avant l’avocat de la grand-mère, Julien Pinelli, laissant entendre que la garde à vue de sa cliente avait également été prolongée.
« Philippe Vedovini et son épouse, grands-parents d’Emile (…), ainsi que deux de leurs enfants majeurs, ont été placés en garde à vue des chefs d’homicide volontaire et recel de cadavre par les enquêteurs de la section de recherches de la gendarmerie de Marseille », avait annoncé tôt mardi le procureur de la République d’Aix-en-Provence, Jean-Luc Blachon.
Une éventuelle prolongation des gardes à vue de l’oncle et de la tante d’Emile, également interpellés et interrogés dans un autre lieu, n’était pas immédiatement connue.
Les auditions « se passent bien » et sans « confrontation »
Philippe Vedovini, 59 ans « répond aux questions et est là pour qu’on s’approche de la vérité, en espérant qu’on y arrive », a déclaré Me Colombani. « J’espère que ces gardes à vue permettront d’aboutir à quelque chose », a ajouté l’avocate, en indiquant que les auditions reprendraient « mercredi matin ».
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Les auditions « se passent bien » et sans « confrontation », avait-elle précisé plus tôt dans la soirée, soulignant que « la garde à vue n’est pas une décision de culpabilité ». Selon une source proche du dossier, les enquêteurs ont également procédé dans la journée à « une dizaine d’auditions de témoins ».
Une perquisition s’est déroulée mardi au domicile des grands-parents d’Emile, un cossu mas provençal situé à La Bouilladisse, commune de 6 000 habitants entre Aix-en-Provence et Aubagne, dans les Bouches-du-Rhône En fin de matinée, des enquêteurs ont saisi pour expertise un véhicule SUV et une remorque à cheval.
Emile, âgé de 2 ans et demi, a disparu le 8 juillet 2023 alors qu’il venait d’arriver pour les vacances d’été chez ses grands-parents maternels, dans leur résidence secondaire du hameau du Haut-Vernet, dans les Alpes-de-Haute-Provence.
Malgré plusieurs jours de battues citoyennes et de « ratissages judiciaires », aucune trace de l’enfant n’avait été retrouvée. Pendant neuf mois, l’enquête n’avait rien donné de concret, jusqu’à la découverte, à la fin de mars 2024, par une promeneuse du crâne et de dents de l’enfant, à environ 1,7 kilomètre du hameau, à vingt-cinq minutes de marche pour un adulte.
Les juges d’instruction, qui pilotent l’enquête à Aix-en-Provence, avaient déployé dans la foulée des dizaines de gendarmes, parmi lesquels des spécialistes de « l’ingénierie scène de crime », des anthropologues et deux équipes cynophiles de recherche de restes humains. Ils ont pu retrouver des vêtements et un petit bout d’os, dans la même zone. Pour autant, ces découvertes n’ont, à ce jour, pas permis de déterminer les causes de la mort de l’enfant.
« Opérations criminalistiques » en cours
Le 13 mars, la présence des enquêteurs dans le hameau du Haut-Vernet avait relancé les spéculations. Les gendarmes avaient alors, selon plusieurs médias, saisi une grande jardinière disposée à l’entrée de la chapelle du hameau. Le parquet s’était refusé à toute confirmation.
« Ces placements en garde à vue s’inscrivent dans une phase de vérifications et de confrontations des éléments et informations recueillis lors des investigations réalisées ces derniers mois », a déclaré mardi matin le procureur. « Les enquêteurs procèdent, par ailleurs, à des opérations criminalistiques en divers lieux du territoire », a-t-il ajouté, précisant qu’« une nouvelle communication interviendra à l’issue des actes en cours ».
Le grand-père d’Emile, Philippe Vedovini, est ostéopathe à La Bouilladisse, berceau de cette famille catholique très fervente. Avec sa femme, ils ont eu dix enfants, tous scolarisés à la maison, dont la mère d’Emile, Marie, qui est l’aînée.
Philippe Vedovini avait été placé il y a plusieurs années sous le statut de témoin assisté dans une enquête sur des soupçons de violences et d’agressions sexuelles au début des années 1990 dans la communauté religieuse de la Sainte-Croix de Riaumont à Liévin (Pas-de-Calais), où il était chef scout.
Dix-neuf mois après la disparition d’Emile, des obsèques publiques avaient été célébrées le 8 février dans la basilique de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume (Var), selon le rite de saint Pie V (en latin), en présence de toute la famille et de plusieurs centaines de personnes. Quelques heures seulement après la cérémonie, les grands-parents d’Emile avaient publié un communiqué clamant que « le temps du silence doit laisser place à la vérité ». « Dix-neuf mois se sont écoulés, dix-neuf mois sans certitude. Nous avons besoin de comprendre, besoin de savoir, écrivaient-ils. Les moyens de justice ont été déployés, les expertises menées, et pourtant nous ignorons toujours ce qui est arrivé à Emile depuis sa disparition, le 8 juillet 2023. »