Israël est intervenu, mercredi 30 avril, dans les affrontements à caractère confessionnel qui ont fait au moins 18 morts à Sahnaya, près de Damas. Ces heurts ont éclaté au lendemain de violences dans une localité voisine à majorité druze, qui ont fait 17 morts.
Selon le ministère de l’intérieur syrien, des « groupes hors la loi » ont attaqué mercredi matin « des postes et barrages » des forces de sécurité aux abords de Sahnaya, faisant 11 morts. Cinq autres membres ont été tués dans une autre attaque, portant à 16 le bilan des morts parmi les forces de sécurité, selon le communiqué du ministère.
Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), deux combattants druzes ont en outre été tués à Sahnaya. L’armée israélienne, elle, a annoncé dans un communiqué que « trois citoyens syriens druzes ont été évacués de Syrie pour recevoir des soins médicaux en Israël ».
A 15 kilomètres au sud-ouest de la capitale, Sahnaya voit s’opposer des forces affiliées aux autorités à des combattants locaux druzes.
Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, et son ministre de la défense, Israel Katz, ont affirmé mercredi que « l’armée israélienne a[vait] mené une action d’avertissement et frappé l’organisation d’un groupe extrémiste qui se préparait à attaquer la population druze de la ville de Sahnaya ». Le communiqué conjoint de MM. Nétanyahou et Katz ajoute que, « dans le même temps, un message ferme a été adressé au régime syrien : Israël attend de lui qu’il agisse pour protéger la communauté druze ».
Appel à « refuser l’ingérence d’Israël »
L’agence officielle syrienne SANA a aussi fait état mercredi de frappes israéliennes sur « les environs de la région de Sahnaya ». Plus tôt, le chef d’état-major israélien, Eyal Zamir, avait « donné instruction à l’armée de se préparer à frapper des cibles du pouvoir syrien si la violence contre la communauté druze persistait », selon un communiqué de l’armée.
Le chef druze libanais Walid Joumblatt a appelé ses coreligionnaires en Syrie à « refuser l’ingérence d’Israël », qui affirme vouloir les protéger contre le pouvoir central. Lors d’une réunion de dignitaires druzes convoquée à Beyrouth pour débattre de la situation en Syrie, il a accusé les Israéliens de vouloir « entraîner les Druzes dans une guerre interminable contre les musulmans ».
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Après ces affrontements, le commandant Houssam Al-Tahhane, directeur de la sécurité de la banlieue de Damas, a annoncé « le déploiement des forces de sécurité pour rétablir l’ordre », cité par l’agence de presse officielle SANA.
Les autorités syriennes ont réaffirmé leur « engagement ferme à protéger toutes les composantes du peuple syrien sans exception, y compris les membres de la communauté druze, qui a toujours été et reste une partie intégrante du tissu national », dans un communiqué du ministère des affaires étrangères. Celui-ci exprime aussi « son rejet catégorique de toute ingérence étrangère », après l’intervention militaire israélienne.
L’envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie, Geir Otto Pedersen, s’est dit « profondément inquiet » des violences « inacceptables » qui secouent la Syrie. Dans un communiqué, il s’est dit « alarmé » par le « potentiel d’escalade supplémentaire d’une situation extrêmement fragile » après les violences autour de Damas et de Homs, et a exigé que cessent les attaques israéliennes.
La Turquie a aussi appelé Israël à « mettre fin à ses frappes aériennes qui nuisent aux efforts d’unité et d’intégrité » du pays, selon le porte-parole du ministère des affaires étrangères, Öncü Keçeli.
Un accord avait été scellé pour mettre un terme aux affrontements
Lundi, des affrontements meurtriers dans la localité voisine à majorité druze de Jaramana, aux environs de Damas, avaient fait 17 morts, selon un nouveau bilan de l’OSDH : huit combattants druzes et neuf membres des groupes armés qui ont donné l’assaut à la localité.
En soirée, un accord avait été scellé entre des représentants du gouvernement syrien et les responsables druzes de Jaramana, pour mettre un terme aux affrontements.
Le mufti de Syrie, Oussama Al-Rifaï, a mis en mercredi contre le risque de « discorde » religieuse après ces affrontements. « Frères syriens, méfiez-vous de la discorde, car on en connaît le début, mais nul ne sait comment elle se termine », a-t-il déclaré dans une allocution diffusée sur sa page officielle sur Facebook. « Si la discorde se répand dans notre pays (…) nous serons tous perdants », a ajouté le grand mufti.
Ces violences ont réveillé le spectre des affrontements confessionnels, après des massacres qui ont visé, en mars, la minorité alaouite dont était issu le président déchu Bachar Al-Assad, renversé en décembre par la coalition islamiste au pouvoir.
L’attaque contre Jaramana a été menée par des groupes affiliés au pouvoir après la diffusion sur les réseaux sociaux d’un message audio attribué à un Druze et jugé blasphématoire à l’égard du prophète Mahomet. L’Agence France-Presse n’a pas pu vérifier l’authenticité du message et les chefs spirituels de la minorité druze ont condamné toute atteinte au prophète.