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le destin d’une famille coréenne au fil du XXᵉ siècle

by Marko Florentino
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Sunja (Youn Yuh-jung) dans la série « Pachinko », créée par Soo Hugh.

APPLE TV+ – À LA DEMANDE – SÉRIE

Prévue pour le milieu de l’été, la saison 2 de l’adaptation, par Soo Hugh, du roman de l’Américaine-Coréenne Min Jin Lee (publié en France en 2021 chez Charleston), a été judicieusement décalée à la fin du mois d’août, comme plusieurs autres séries, sans doute afin d’éviter une concurrence trop frontale avec les Jeux olympiques de Paris. Pachinko mérite en effet qu’on lui consacre un peu d’attention, d’autant plus que la deuxième saison confirme les qualités esthétiques et l’ambition romanesque de cette saga historique qui suit le destin d’une famille d’immigrés coréens, de la colonisation par le Japon au début du XXe siècle jusqu’au krach boursier de 1989, qui signe la fin d’une certaine idée du miracle japonais.

L’ampleur de Pachinko tient à son dispositif narratif, qui fait dialoguer le destin de Sunja, fille unique de parents pauvres, forcée à la débrouille depuis son plus jeune âge mais dotée d’une force de caractère à toute épreuve, avec celui de son petit-fils Salomon, requin de la finance qu’un événement anodin conduit à revisiter son histoire familiale : l’achat d’un petit bout de terrain tokyoïte à une vieille dame récalcitrante, afin de lancer la construction d’un complexe immobilier.

Au début de cette deuxième saison, la seconde guerre mondiale vient d’éclater. Sunja, ses deux fils et sa belle-sœur Kyunghee s’emploient à survivre en l’absence de leurs maris respectifs, mais avec l’aide inattendue de Hansu, l’ancien amant de Sunja, venu se réapproprier la famille qu’il avait pourtant choisi de délaisser. La grande histoire se mêle à la petite dans un grand tourbillon de sentiments, et comme avec le tremblement de terre du Kanto de 1923 dans la première saison, la série consacre un épisode, spectaculaire, au largage de la bombe atomique sur Nagasaki.

Double regard

A plusieurs décennies d’écart, dans un bureau de Tokyo, Salomon tente de faire aboutir des affaires dont on a déjà oublié les tenants et les aboutissants, tant l’intérêt de la série réside moins dans la façon dont le jeune homme s’affirme comme homme d’affaires (celles de son père, propriétaire d’une salle de pachinko, le flipper coréen, seront sans doute le sujet de la troisième saison) que dans celle dont il concilie ses origines, qui font de lui un citoyen de seconde zone au Japon, avec ses ambitions personnelles.

Ce grand ballet de la raison et des sentiments est mis en scène à travers un double point de vue, celui de Sunja et celui de Salomon, ce qui donne une acuité particulière au récit et exalte l’empathie que l’on ne manquera pas d’avoir pour ces personnages malmenés par l’histoire. Ce double regard est celui qui révèle la profondeur des blessures laissée par la colonisation, c’est aussi un regard réparateur, et rien n’est plus beau que celui que Sunja, âgée, pose sur son petit-fils.

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