Sur la paillasse, des dizaines d’éprouvettes annotées et étiquetées de couleurs différentes attendent, alignées dans leurs casiers, d’être manipulées. Assise à sa table, une technicienne prépare la mixtion urinaire qui sera injectée pour analyse dans un spectromètre de masse. En face, son collègue renseigne des feuilles noircies de code-barres. Dans la pièce attenante, dite « salle des robots », les appareils d’extraction font entendre un entêtant ronronnement. C’est là, dans un lieu tenu secret sur le campus de l’université Paris-Saclay à Orsay (Essonne), qu’est implanté le Laboratoire antidopage français (LADF), auquel Le Monde a eu accès à l’occasion d’une visite ministérielle.
Pendant les Jeux olympiques (JO, du 26 juillet au 11 août), le LADF sera chargé d’analyser six mille échantillons urinaires et sanguins – deux mille pendant les Jeux paralympiques (du 28 août au 8 septembre). Soit l’équivalent de quatre mois d’activité normale. Un tour de force pour les quarante salariés du site, dont une vingtaine de techniciens, qui seront renforcés, le temps des Jeux, par une soixantaine de confrères issus d’autres laboratoires accrédités par l’Agence mondiale antidopage (AMA), le régulateur du secteur.
« Le laboratoire de Saclay, c’est le fleuron de l’antidopage français », s’enorgueillissent, le 20 juin, la ministre des sports et des Jeux, Amélie Oudéa-Castéra, et son homologue à l’enseignement supérieur et à la recherche, Sylvie Retailleau. Il a pourtant bien failli ne pas être habilité pour les Jeux, un affront inconcevable pour l’Etat organisateur et le laboratoire qui a inventé le test contre l’érythropoïétine (EPO) au début des années 2000.
Pour garder son rang, la France a dû se mettre en conformité avec le code mondial antidopage. Le laboratoire a été, comme l’impose l’AMA, affranchi juridiquement de l’organisation nationale de contrôle, en l’occurrence l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), par l’ordonnance du 21 avril 2021.
Il lui a surtout fallu démontrer qu’il était apte à traiter le volume d’échantillons requis, pendant les Jeux, par les deux autorités de contrôle : l’International Testing Agency (ITA) – créée en 2018 par le Comité international olympique et chargée du programme antidopage pendant les JO – et le Comité international paralympique – seul responsable pour l’édition paralympique.
Comparaisons d’empreintes génétiques
Or, cela était impossible dans les locaux vétustes et étriqués utilisés jusqu’au printemps 2023 au centre de ressources, d’expertise et de performance sportive d’Ile-de-France à Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine). C’est ce qui a conduit à un déménagement à Saclay, où, après plusieurs mois de réhabilitation, à peine retardée par le Covid-19, le site est opérationnel depuis la mi-mai 2023. Coût : près de 13 millions d’euros, à la charge de l’Etat.
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