Née en 1994, Lee Yaron est journaliste à Haaretz, quotidien israélien classé à gauche et bête noire du gouvernement Nétanyahou. Elle s’est fait connaître par ses reportages sur les affaires de corruption et sur la crise climatique, mais aussi sur les questions de discrimination. Ayant consacré de nombreux articles aux violences subies par les femmes, les personnes LGBTQ+ ou les demandeurs d’asile, elle a pu décrire tous les visages de la société israélienne (juifs, arabes, bédouins, éthiopiens, soudanais, chinois…).
Après les attaques perpétrées par le Hamas et le Jihad islamique en Israël le 7 octobre 2023, attaques lors desquelles 1 140 personnes, essentiellement des civils, ont été assassinées, et 250 autres ont été enlevées (selon le bilan israélien), Lee Yaron a voulu raconter à hauteur de femmes et d’hommes comment cette société a été frappée dans sa diversité : « Des kibboutzniks de gauche, des festivaliers, des Bédouins, des Arabes israéliens, des travailleurs thaïs et népalais, des activistes, des rescapés de la Shoah ou encore des réfugiés ukrainiens et russes », égrène-t-elle.
Après avoir recueilli la parole des survivants, des endeuillés et des secouristes, elle signe aujourd’hui le premier livre qui reconstitue « la journée la plus meurtrière de l’histoire d’Israël ». Intitulé 7 octobre, ce récit paraît le 24 avril aux éditions Grasset. « Le Monde des livres » en publie de larges extraits. Jean Birnbaum
Bonnes feuilles.
Le festival Tribe of Nova
[Bien plus qu’une rave-party, ce festival s’inscrit dans un vaste mouvement international qu’on nomme parfois « néospiritualité occidentale ». Les femmes et les hommes qui l’animent prônent des valeurs de paix et de cohabitation non seulement entre les peuples mais aussi avec l’ensemble des êtres vivants, la dimension écologique étant très importante. Au total, 364 personnes ont été assassinées et 40 autres ont été kidnappées par le Hamas et le Jihad islamique sur les lieux de ce festival.]
« Combien de temps un cadavre met‑il à pourrir ? »
Le téléphone de Haïm Utmazgin a sonné vers 19 h 30.
Orthodoxe et père de six enfants, Haïm accueillait une vingtaine d’invités, dont ses gendres et belles‑filles, dans sa maison de Petah Tikva. C’était un jour de fête – pas le moment idéal pour un appel.
La personne à l’autre bout du fil était un jeune rabbin qu’il connaissait à peine ; ils ne s’étaient croisés qu’une ou deux fois.
« Je ne suis pas sûr de bien comprendre – pouvez‑vous répéter ? a répondu Haïm.
— Combien de temps, combien d’heures faut‑il pour qu’un corps pourrisse ?
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