Un fin pinceau dans une main, une palette d’aquarelliste dans l’autre, la restauratrice Chiara di Marco, de l’atelier Arcanes, bras levé, s’applique à repiquer le visage d’un enfant sur la fresque de Giambattista Tiepolo (1696-1770), qui surplombe la salle à manger du Musée Jacquemart-André. A l’instar des décors muraux, des boiseries, des tapisseries, des dorures et des marbres qui font de cet hôtel particulier du boulevard Haussmann, dans le 8e arrondissement de Paris, un des joyaux de la capitale, les peintures murales du Vénitien, maître du trompe-l’œil, détachées de la Villa Contarini, à Mira, nécessitaient un sérieux décrassage depuis la dernière rénovation, entreprise en 1998.
Depuis septembre 2023, ouvriers et artisans d’art s’emploient à redonner son éclat à l’établissement, protégé au titre des Monuments historiques, propriété de l’Institut de France depuis 1912, date à laquelle il lui fut légué par Nélie Jacquemart (1841-1912), artiste et mécène, veuve du politicien Edouard André (1833-1894). Tous deux collectionneurs et amateurs d’art, notamment de peinture italienne, hollandaise et française (Uccello, Rembrandt, Chardin, Boucher…) , les époux avaient fait bâtir cette résidence en 1875 pour y exposer leurs acquisitions ainsi que les œuvres qu’ils rapportaient de leurs nombreux voyages – outre l’Italie, l’Egypte, la Perse, la Syrie… Quelques privilégiés étaient invités à venir les découvrir dans leur demeure écrin à l’occasion d’un bal, d’une soirée mondaine ou d’un dîner de gala, plaisirs que s’offrait la bourgeoisie de l’époque. Dans son testament, Nélie Jacquemart avait fait part de sa volonté d’ouvrir les collections à un plus large public.
Avec sa transformation en musée, le lieu a vu sa fréquentation bondir – en moyenne 400 000 personnes par an –, entraînant une accélération de sa dégradation, dont la Cour des comptes s’était alarmée dans un rapport publié en 2021. L’Institut de France a profité du renouvellement jusqu’au 31 décembre 2029 du contrat de concession signé avec Culturespaces, une société qui gère le lieu depuis 1996, pour engager des travaux entraînant la fermeture du musée pour une durée d’un an. Il doit rouvrir en septembre avec une exposition réunissant une quarantaine de chefs-d’œuvre de la Galerie Borghèse, à Rome, dont plusieurs tableaux du Caravage, de Botticelli ou de Raphaël.
Changement de ton
Parallèlement à la rénovation des salles et des œuvres, une mise aux normes s’imposait pour un établissement qui dispose d’une cuisine et d’un restaurant. L’occasion aussi de revoir tout l’éclairage en remplaçant les spots par des lampes à LED, plus économes en énergie.
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