
Un écrivain de 80 ans dort en prison en Algérie. Ou plus précisément dans une annexe de l’hôpital Mustapha-Pacha où il a été transféré le 21 novembre, cinq jours après son arrestation à l’aéroport d’Alger. Boualem Sansal, dont les écrits résonnent en France et à l’étranger, a été placé sous mandat de dépôt par le procureur spécialisé dans les dossiers de sûreté de l’Etat du tribunal de Dar El-Beïda, dans la banlieue sud-est de la capitale. Il va mieux selon une source judiciaire et « a fait appel de son mandat de dépôt », précise-t-elle.
L’auteur franco-algérien est notamment accusé d’« atteinte à l’intégrité du territoire national », ce qui selon l’article 87 bis du code pénal, est assimilé à un acte de « terrorisme ». Il risque la réclusion criminelle à perpétuité, voire la peine de mort – bien qu’aucune exécution capitale n’ait eu lieu en Algérie depuis 1993.
Certains journalistes et activistes à Alger espéraient, sans trop y croire, que les autorités choisiraient la modération en plaçant l’auteur sous contrôle judiciaire – une peine généralement assortie d’une interdiction de quitter le territoire – afin d’éviter une incarcération dommageable pour la renommée internationale du pays. Des alertes n’ont pas manqué, dont celle, sur X, d’Abdelaziz Rahabi, ancien ministre de la culture et de la communication, qui, tout en étant très critique à l’égard de Boualem Sansal, estimait que « son arrestation le servira et desservira l’image de l’Algérie à l’étranger ».
L’incarcération de l’écrivain montre un durcissement de la part des autorités algériennes, lequelles, par cette décision, font preuve d’arbitraire à l’égard d’un auteur dont les opinions déplaisent. Interpellé le 16 novembre à son arrivée à l’aéroport d’Alger par des membres de la direction générale de la sécurité intérieure, Boualem Sansal n’avait depuis donné aucun signe de vie. Aucune information officielle n’avait par ailleurs filtré sur son arrestation, confirmée indirectement, le 22 novembre, par un communiqué de l’agence officielle Algérie Presse Service, qualifiant Boualem Sansal de « pseudo-intellectuel, vénéré par l’extrême droite française » et de « pantin du révisionnisme anti-algérien ».
Les raisons de sa garde à vue n’étaient toujours pas dévoilées, mais plus les jours passaient et plus l’espoir d’un « simple » délit correctionnel s’éloignait. Dans un tel cas, le « suspect » ne peut être retenu que quarante-huit heures, renouvelables deux fois. Ce délai ayant expiré, la procédure pour « terrorisme » engagée contre cet ingénieur de formation paraissait inéluctable.
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