
Confronté à la défiance des présidents des conseils départementaux à propos des choix budgétaires du gouvernement, le premier ministre, Michel Barnier, a tenu à les rassurer, vendredi 15 novembre, à l’occasion d’un discours au congrès des départements de France, à Angers.
« Nous allons réduire très significativement l’effort qui vous est demandé », a annoncé le chef du gouvernement, récoltant des applaudissements, avant d’ajouter : « A aucun moment mon état d’esprit ne sera de montrer du doigt les départements. » Annonçant une série de pistes pour faire évoluer le texte budgétaire, Michel Barnier a néanmoins estimé que « l’objectif [de déficit à 5 % du PIB pour 2025 ] » devait être « préservé ».
Le premier ministre a notamment évoqué la réduction du taux du prélèvement sur les recettes des départements, initialement prévu à 2 %, ou encore un relèvement pour trois ans du plafond des droits de mutation à titre onéreux, prélevés sur les transactions immobilières, à hauteur de 0,5 point. Cette mesure devrait rapporter un milliard d’euros. Les concours versés aux départements par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie seront, par ailleurs, rehaussés à hauteur de 200 millions d’euros en 2025.
Le projet de loi de finances pour 2025 qui est discuté actuellement au Parlement prévoit des économies de 5 milliards d’euros pour les collectivités. Or, selon l’association Départements de France, les départements sont la strate de collectivités la plus affectée, avec 44 % de l’effort, soit 2,2 milliards d’euros.
Les départements font face à une explosion de leurs dépenses sociales en matière de protection de l’enfance, d’aide aux personnes âgées dépendantes ou porteuses de handicap mais voient dans le même temps fondre leurs recettes issues des transactions immobilières et enregistrent moins de TVA qu’attendu.
« Oxygène »
A la veille du discours de Michel Barnier, les présidents de départements de droite avaient menacé de suspendre le versement du revenu de solidarité active (RSA) et d’arrêter de prendre en charge les nouveaux mineurs non accompagnés (MNA). Le président du groupe des départements de la droite, du centre et des indépendants (DCI) au sein de Départements de France, Nicolas Lacroix, menaçait aussi « d’attaquer l’Etat » en justice à chaque fois qu’il prendrait une décision « qui impacte les finances des départements sans leur accord ».
En réponse, le premier ministre a annoncé la mise en place, à partir du « début de l’année 2025 », d’une « instance de pilotage, partagée par l’Etat et les départements, qui actera les grandes décisions ». « Cette instance ne sera pas seulement informée, mais je veux qu’elle soit consultée pour toute décision de l’Etat qui affecte les finances départementales », a-t-il précisé, évoquant notamment le travail à mener pour la création d’une « allocation sociale unique ».
Devant les élus locaux, le premier ministre a aussi plaidé pour « une évolution du mode de financement des départements », alors que selon lui, « le levier fiscal a été fortement réduit ; à se demander même s’il existe encore ». « Je n’accepte pas que les départements aient le sentiment de devenir de simples opérateurs de l’Etat. Ce n’est pas ce que nous avons voulu avec les lois de décentralisation », a-t-il rappelé. Michel Barnier a affiché son souhait de « redonner des marges de manœuvre, de l’oxygène, de la liberté » aux départements, « pour restaurer le sens de [leur] mission ».