Le premier ministre, François Bayrou, a convoqué à Matignon, mardi 18 mars, plusieurs ministres qui ont récemment exprimé des positions divergentes sur le port du voile dans le sport, a appris l’Agence France-Presse (AFP) auprès d’un membre du gouvernement concerné.
Ont été convoqués les ministres de l’éducation, Elisabeth Borne, de la justice, Gérald Darmanin, de l’intérieur, Bruno Retailleau, des sports, Marie Barsacq, et de l’égalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé, selon cette source, confirmant une information du Parisien.
Lors du petit déjeuner des groupes politiques soutenant le gouvernement mardi matin, François Bayrou a fustigé des « critiques internes » au sein du gouvernement « qui sont inacceptables », a rapporté l’un des convives.
M. Darmanin a estimé, mardi, qu’il fallait interdire le port du voile dans le sport et « regretté » la position de la ministre des sports, qui a exprimé ses réserves sur un texte voté en février au Sénat sur le sujet. « Il faut interdire le voile dans les compétitions sportives, c’est une évidence », a déclaré le ministre de la justice sur TF1.
« Je regrette que la ministre des sports comme la ministre de l’éducation nationale ne soutiennent pas plus cette autorité républicaine, comme on l’a toujours, me semble-t-il, fait en France et qui nous prémunit des difficultés », a-t-il ajouté.
« Confusions » et « amalgames »
« On ne peut pas rester dans un gouvernement qui cède sur ces questions-là », a-t-il aussi déclaré au journal Le Parisien. L’entourage du garde des sceaux a assuré à l’AFP qu’il « n’y a[vait] pas de chantage à la démission » et que « la question ne se pos[ait] pas tant que la ligne du gouvernement n’est pas la remise en cause de l’interdiction du voile dans les compétitions sportives ».
La ministre des sports a exprimé ses réserves sur le sujet à plusieurs reprises à la suite du vote en février par le Sénat d’une proposition de loi des Républicains interdisant le voile dans les compétitions sportives, mettant en garde contre les « confusions » et les « amalgames » entre le port du voile et la radicalisation dans le sport.
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Lundi, la ministre de l’éducation nationale a estimé sur Franceinfo qu’il était de « la responsabilité des fédérations de définir leur règlement intérieur ». « Le Conseil d’Etat nous a confirmé que quand les fédérations mettent en place des règlements intérieurs qui disent “la tenue, c’est la tenue”, ça suffit et ça protège », a déclaré Mme Borne.
« On ne peut pas accepter le moindre accommodement avec le communautarisme. Et les terrains de sport sont des lieux neutres où l’on pouvait avoir une compétition sans se demander quelle est la religion des personnes qui font cette compétition », a argué mardi M. Darmanin, jugeant que le port du voile dans les compétitions sportives n’était pas une « tradition française ».
« Une seule ligne au sein du gouvernement »
Le débat s’est élargi mardi lors de la séance des questions au gouvernement. « L’islam politique avance sans opposition », a affirmé le député (Rassemblement national) Julien Odoul, dénonçant, du côté du gouvernement, « quatre ministres, deux discours et zéro ligne politique ».
Mme Bergé lui a répondu qu’il n’y avait « qu’une seule ligne au sein du gouvernement, celle portée par le premier ministre ». Elle a souligné le soutien de l’exécutif à la « proposition de loi amendée qui a été portée au Sénat » concernant le principe de laïcité dans le sport. La ligne du gouvernement, selon elle, « dit explicitement qu’il n’y a aucun signe religieux ostentatoire qui doit pouvoir être porté dans les compétitions sportives ».
Sollicitée par l’Agence France-Presse, la ministre des sports, Marie Barsacq, a assuré de son côté qu’elle soutenait la position du gouvernement, après avoir toutefois exprimé des réserves, en mettant en garde contre les « amalgames » entre le port du voile et la radicalisation dans le sport. Le chef de file des députés macronistes, Gabriel Attal, s’est, lui, prononcé en réunion de groupe pour une interdiction du voile dans les compétitions sportives, mais sans dire si ça devait passer par la loi.
Proscrit par certaines fédérations sportives, celle du football par exemple, autorisé par d’autres, comme le handball, le port du voile divise depuis plusieurs années le sport français.