« Vous n’avez pas payé ? Vous êtes des mauvais payeurs ? (…) Non, je ne vous protégerais pas. En fait, j’encouragerai [les Russes] à faire ce que bon leur semble. » Cette déclaration de Donald Trump lors d’un meeting électoral en Caroline du Sud, samedi 10 février, a suscité de vives réactions, parce qu’il remet en cause le principe de solidarité entre les Etats membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN).
Cette charge du candidat à la primaire républicaine contre les alliés américains n’est pas nouvelle : pendant sa présidence (2017-2021), Donald Trump critiquait déjà un supposé déséquilibre entre les alliés sur le financement de l’Alliance atlantique. Mais en parlant de « mauvais payeurs » et de « pays [qui] nous doivent un énorme paquet d’argent depuis des années », l’ancien président entretient une confusion.
En effet, il n’est pas ici question du financement direct de l’OTAN : le budget de 3,8 milliards d’euros (pour 2024), qui permet d’assurer le fonctionnement de l’organisation et de ses commandements militaires, est abondé par des contributions de ses membres, au prorata de leurs capacités budgétaires et de leurs besoins militaires. Ce point ne pose pas vraiment problème.
Les 2 % du PIB, une règle instaurée en 2006
Les critiques de Donald Trump font en réalité référence au financement indirect de l’OTAN, qui est beaucoup plus important. L’Alliance ne disposant pas de forces armées, ce sont ses membres qui mettent à disposition de l’organisation les troupes et matériels nécessaires aux opérations, sur la base du volontariat. Ce sont donc les capacités de défense de chaque pays qui sont sollicitées pour contribuer à la capacité de l’organisation.
Pour mesurer cet effort, il est d’usage de ramener les dépenses annuelles de défense de chaque Etat à sa richesse nationale, mesurée par le produit intérieur brut (PIB). Il s’agit selon l’OTAN d’un « indicateur de la volonté politique de chaque Etat de contribuer à l’effort global ».
Pendant longtemps, aucune règle claire ne fixait le niveau minimal de dépenses militaires exigé des Etats membres. Dans les faits, les Etats-Unis représentaient une part substantielle de ces dépenses, tandis que plusieurs autres membres tendaient à diminuer les leurs.
A partir de 2006, les Etats membres de l’Alliance ont convenu de renverser cette tendance, en se fixant collectivement l’objectif de porter leur budget militaire à au moins 2 % du PIB. Après l’annexion de la Crimée par la Russie, en 2014, les pays membres ont précisé cet objectif : le but était alors de « se rapprocher » de 2 % d’ici à 2024, sans que cette règle devienne pour autant contraignante.
A la fin de 2023, seuls onze des trente et un membres avaient tenu promesse. La France se trouve encore légèrement en deçà (1,9 %), et l’Allemagne encore plus loin (1,6 %). Toutefois, Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’OTAN, a déclaré le 14 février que sept pays supplémentaires atteindraient les 2 % en 2024. Une dizaine de membres resteraient alors hors des clous.
La tendance est néanmoins à la hausse des budgets de défense. Depuis 2014, tous les pays de l’organisation l’ont augmenté – huit d’entre eux l’ayant même plus que doublé. Même si la part des Américains dans le financement indirect de l’OTAN a été légèrement réduite sau cours de cette période (de 72 % à 68 % en dollars constants), les Etats-Unis restent de loin le premier contributeur indirect au sein de l’Alliance, avec un budget alloué à la défense de plus de 860 milliards de dollars (800 milliards d’euros) sur un total de 1 264 milliards de dollars de budget pour l’ensemble des alliés.