Temu, gigantesque bazar numérique d’objets souvent en plastique et souvent made in China, est dans le collimateur de la Commission européenne. Cette dernière a déclenché, jeudi 31 octobre, une enquête contre les pratiques commerciales de la plateforme chinoise de commerce en ligne, populaire dans le monde entier. L’exécutif européen fonde son action sur de « fortes suspicions » de violations du règlement européen sur les services numériques, mieux connu sous le nom de DSA (Digital Services Act).
Temu a attiré l’attention des autorités dès son arrivée en Europe, en avril 2023, en s’imposant à grands coups de prix cassés et de dépenses marketing considérables. Un an et demi après son lancement, la plateforme compte 92 millions d’utilisateurs mensuels, dépassant largement le seuil des 45 millions nécessaire pour être considéré, au regard du droit européen, comme une « très grande plateforme ». Cette appellation est loin d’être anodine. Elle implique une supervision directe de la Commission européenne, qui a désormais la main pour contrôler, en lien avec les autorités des Etats membres, l’application de la loi.
Aujourd’hui, rien ne garantit que les produits, qui inondent le marché depuis la Chine via Temu ou d’autres plateformes équivalentes, sont conformes aux normes européennes. C’est l’un des principaux griefs de la Commission qui a, très tôt, été alertée par des associations de consommateurs et des autorités nationales.
Des associations de consommateurs ont recensé de nombreux produits non conformes, parfois dangereux, accessibles sur la plateforme. Elles ont, par exemple, repéré des articles dont les instructions n’étaient disponibles qu’en chinois, des produits cosmétiques sans liste d’ingrédients ou des jouets pour bébés comprenant de petites pièces trop facilement détachables. Des produits pharmaceutiques, de bijouterie et toutes sortes d’articles manufacturés sont concernés. La Commission cherche à savoir si ces errements, au regard du DSA, sont « systémiques ».
Des caractéristiques « addictives »
Sébastien Pant, porte-parole du Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC), souligne la responsabilité des plateformes : « Les très grandes plateformes comme Temu sont dans l’obligation de mettre en place un système pour empêcher la vente de produits dangereux sur le marché européen. Sans cela, Temu est dans l’incapacité de garantir aux consommateurs que ses produits respectent les normes. » Avant le déclenchement officiel de l’enquête, la Commission a demandé à l’entreprise chinoise de produire une « évaluation des risques », mais « celle-ci est restée trop générale », commente une source de la Commission.
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