« Objectif : 2 millions d’abonnés » peut-on lire sur une affiche collée à la porte du bureau de Gaspard G. Lorsqu’il comprend que nous avons vu cette projection ambitieuse, le youtubeur de 26 ans explose de rire. « Il faut que je fasse gaffe à ce que je montre », lance-t-il. Le bureau du créateur de contenu est organisé. Sur les parois vitrées, des notes adhésives colorées indiquent les choses qu’il lui reste à faire : tourner une nouvelle enquête, caler des interviews, écrire la prochaine vidéo de sa chaîne. « Pour être honnête, avoir deux millions d’abonnés, je m’en fiche un peu. Ce qui compte vraiment c’est d’atteindre le million. C’est un seuil de crédibilité qui est intéressant », explique-t-il.
Le million, il y est presque. Avec plus de 870 000 abonnés sur YouTube, Gaspard Guermonprez (de son vrai nom) est l’un des créateurs de contenu d’actualité les plus populaires de la plate-forme. Sur sa chaîne, il produit de longues vidéos plus ou moins en lien avec l’actualité nationale et internationale. Celles qui fonctionnent le mieux, ce sont les portraits de personnalités publiques comme Beyoncé, Pablo Escobar ou encore Cyril Hanouna. Face caméra, simplement vêtu d’un tee-shirt et d’une chemise ouverte, le jeune homme déroule le parcours d’une figure historique. Son plus gros succès ? L’histoire de Ben Laden, qui cumule plus de 4 millions de vues.
Depuis un an, il s’essaye également à l’enquête journalistique. Ses abonnés peuvent ainsi voir le youtubeur partir sur le front en Ukraine et interroger les civils, ou s’envoler pour la Martinique et parler aux victimes de l’empoisonnement au chlordécone. En mars, il a codiffusé avec Franceinfo un débat autour de la transition écologique et sociale avec les principaux candidats aux élections européennes. Pour ces mêmes élections, il est le seul youtubeur à avoir interviewé six des sept premières têtes de liste.
Pourtant, Gaspard G hésite lorsqu’il s’agit de parler de son métier. Est-il youtubeur ou journaliste ? « Ma réponse dépend de la personne en face de moi. J’évite de le dire quand je suis dans des cercles trop journaleux, parce que je sais que ça hérisse le poil de beaucoup de gens, j’incarne un nouveau modèle » avance celui qui figure au classement français des « 30 under 30 » (« trente personnes de moins de 30 ans ») du magazine Forbes.
« Je n’étais pas un enfant heureux »
Né dans une famille « bourgeoise et catholique » de la région lilloise, d’un père directeur financier et d’une mère employée dans l’agroalimentaire, il débute sur YouTube à l’âge de 10 ans. « J’étais un nerd qui était à fond dans les ordis, se souvient-il, mais à l’époque ce n’était pas un truc de “cool kid” de faire des vidéos sur Internet, c’était un truc de marginal. Je ne cultivais pas du tout cette différence et j’en ai beaucoup souffert. » Harcelé de ses 11 ans à ses 15 ans, jusqu’à porter plainte, le collège est un moment de pur calvaire pour lui : « Je n’allais plus en cours, j’en venais presque à menacer de me défenestrer. Je n’étais pas un enfant heureux. »
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