Son amour du judo est au moins aussi grand que son appétit de victoires. A 35 ans, Teddy Riner dispute à partir du vendredi 2 août ses cinquièmes Jeux olympiques à Paris, mais il a déjà en tête de prolonger sa carrière au-delà. Dans quatre ans, à Los Angeles, le judoka tricolore aura 39 ans, et s’il tient l’engagement qu’il a émis dans les mois qui ont précédé la dernière ligne droite de sa préparation olympique, il pourrait en être. Rencontré mi-mai à Marrakech – sa ville d’adoption –, Riner s’est fait un malin plaisir de contredire ceux qui le voyaient tirer sa révérence à l’issue d’une ultime fête olympique à domicile.
« Los Angeles ? C’est dans un coin de ma tête. Ma femme est au courant. Je ne sais pas si elle d’accord [rire], lance-t-il. J’ai fait une olympiade magnifique en termes de plaisirs, de sensations, de progression et de forme. J’aurais voulu n’avoir que des olympiades comme ça. »
Requinqué et invaincu depuis le quart de finale olympique perdu à Tokyo, Teddy Riner aurait pu cultiver l’idée de finir sur un titre olympique et se retirer ainsi au sommet. « Je pourrais déjà partir maintenant sur quelque chose d’agréable. Ma décision n’a rien à voir avec un succès ou un échec lors des JO de Paris. Non, j’ai envie de continuer », confie-t-il. Il insiste : « Pourquoi j’en garderais sous le pied ? »
« On est un peu sado »
Cette envie de faire du rab, encore inattendue il y a quelques mois, se trouve-t-elle renforcée par la destination 2028 de la grand-messe olympique ? « Los Angeles, ce n’est pas du tout mythique. On va aux States comme on veut, assure-t-il. Je sens simplement que je peux encore tenir quatre ans. »
Le colosse, qui n’a pas épargné son corps depuis ses débuts chez les seniors en 2006, n’a pas peur de souffrir pour cela : « On est un peu sado. Je viens de terminer ma musculation, c’est dur. Après Paris, ça va être encore quatre ans comme ça, mais ça ne me fait pas peur. » Pour le champion, « les Jeux sont quelque chose d’extraordinaire ».
Les mauvais souvenirs de la précédente campagne olympique sont derrière lui. « Tokyo, ça a été très compliqué pour moi avec les blessures », reconnaît-il. S’il a échoué dans sa quête d’une troisième médaille d’or dans la catégorie des plus de 100 kg, il ne le voit pas comme un échec.
Blessé au genou, il a failli « ne pas être au Japon ». « On m’annonce une blessure au croisé [ligament du genou]. Toute ma carrière, j’ai redouté ça, confesse Riner. A la place d’une opération, on me fait tester une jambière qui doit m’empêcher de plier le genou pendant plusieurs mois. »
« Jolie collection » de médailles
Au célèbre Budokan de Tokyo, lieu emblématique du judo nippon, le double champion olympique s’incline de justesse en quart de finale contre le Russe Tamerlan Bashaev, puise au fond de lui pour remporter la médaille de bronze et participe activement le lendemain au sacre collectif de l’équipe de France. « Beaucoup m’ont dit que je devais être déçu, assène-t-il. Non, j’étais déjà extrêmement content d’être présent. Finalement, j’ai réussi à ramener deux médailles [le bronze en solo et l’or par équipes]. La joie était là. »
Même si ce perfectionniste n’est toujours pas persuadé que ce jour-là son adversaire a vraiment marqué sur cette action décisive pendant le golden score. « Cela m’emmerde la façon dont ça se passe en quart. Quand on regarde la vidéo, on comprend les erreurs. Je suis trop gourmand sur ce combat. Et c’est aussi la faute à pas de chance, ma main ripe, se souvient-il. Je ne sais pas si on peut réellement mettre un score là-dessus. On voit que ce n’est pas du tout une attaque de la part de Bashaev. »
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Triple champion olympique, onze fois champion du monde et cinq fois champion d’Europe, Teddy Riner a appris « ce que ça faisait de perdre en championnat. » Et malgré son ego de champion, il a également appris « qu’il n’y avait pas que le judo dans la vie ».
« Il y aura un après-judo, lance-t-il. Ce qui fait relativiser, c’est aussi mon gros palmarès. Certains essaient d’aller chercher une médaille olympique toute leur carrière. Moi, j’en ai une jolie collection… » Une collection de médailles que n’a pas fini d’agrandir le Gargantua du judo mondial.
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