Un homme a été placé en garde à vue puis en hospitalisation sous contrainte pour recevoir des soins psychiatriques, après avoir agressé un rabbin avec une chaise, vendredi 6 juin, à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine).
L’agresseur, qui s’en est pris au rabbin Elie Lemmel installé, à l’heure de midi, à une terrasse de café, notamment en lui jetant une chaise au visage, a été interpellé dans la foulée. Le parquet de Nanterre, qui a saisi la sous-direction de la police judiciaire (SDPJ) du département de la poursuite des investigations concernant cette agression, a confirmé au Monde « qu’une enquête en flagrance [était] ouverte concernant ces faits, qualifiés de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à huit jours [de quatre jours], aggravées par le fait qu’elles auraient été commises à raison de la religion et avec arme par destination ».
L’homme avait d’abord été placé en garde à vue au commissariat de Neuilly-sur-Seine avant de faire l’objet dans l’après-midi d’un examen psychiatrique imposant son placement en hospitalisation sous contrainte, fait savoir le parquet de Nanterre. Le parquet de Nanterre a précisé que « selon les documents d’identité en langue allemande trouvés en sa possession », le suspect « serait né à Rafah », dans le sud de la bande de Gaza, « et serait âgé de 28 ans ». Selon une source proche du dossier à l’AFP, il s’agit d’un Palestinien en situation irrégulière en Allemagne mais titulaire d’un document lui permettant de circuler dans son Land allemand, soulignant qu’il bénéficie d’un statut qui offre une forme de « tolérance » pour les personnes qui ne sont pas expulsables vers un territoire en conflit.
« Un coup par derrière, très violent »
Elie Lemmel, qui présente une plaie au front, assure n’avoir jamais vu son agresseur dont il n’a pas anticipé le passage à l’acte sur la terrasse de café.
Interrogé plus tard sur les lieux de l’agression par CNews, le rabbin, qui s’est dit bouleversé, a expliqué qu’il avait reçu « un coup par-derrière, très violent ». Il a compris qu’il s’agissait d’une agression en entendant les gens autour crier : « Arrêtez-le, arrêtez-le », a-t-il expliqué à la chaîne de télévision. « Il faut faire en sorte qu’un événement pareil ne puisse plus se produire. On a le droit de ne pas être d’accord, mais il faut savoir se respecter », a-t-il ajouté.
Le rabbin a expliqué qu’il avait déjà été agressé la semaine dernière à Deauville (Calvados), par trois personnes alcoolisées qui lui avaient porté un coup violent au ventre. « On est là face à quelque chose que j’appellerais le délit de faciès », a commenté Elie Lemmel sur CNews. Sur ces faits, le parquet de Lisieux (Calvados) avait annoncé, mardi, l’ouverture d’une enquête pour des violences à raison de la religion.
Le CRIF regrette le « climat délétère qui vise les Français juifs »
« C’est une agression, clairement, parce que la personne agressée était un rabbin avec une apparence extérieure qui a mobilisé contre lui l’agression, le déchaînement, la haine d’une personne qui était là », a réagi le premier ministre, François Bayrou, en marge d’un déplacement à Montpellier.
S’il s’est félicité que « l’issue n’[ait] pas [été] tragique », le chef du gouvernement a déploré que « l’état de la société entraîne la radicalisation du débat public et que l’un soutient l’autre ». « S’en prendre à une personne en raison de sa foi est une honte », avait réagi sur X un peu plus tôt dans l’après-midi le ministre de l’intérieur Bruno Retailleau, estimant que l’auteur, « qui n’avait rien à faire en France », devait « être puni sévèrement et éloigné ».
Sur le réseau social X, le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) a dit condamner « avec la plus grande fermeté l’agression antisémite dont a été victime, une nouvelle fois, le rabbin Lemmel aujourd’hui à Neuilly-sur-Seine ». « Dans un contexte général où la haine d’Israël nourrit chaque jour la stigmatisation des juifs, cette agression est une illustration supplémentaire du climat délétère qui vise les Français juifs », a ajouté le CRIF.
« Quand on est identifié publiquement comme juif, on est potentiellement la cible d’activistes haineux qui peuvent, au nom d’une solidarité dévoyée avec la cause palestinienne, décider de s’en prendre à des Français juifs », a insisté également sur BFM-TV le président du CRIF, Yonathan Arfi. « Les actes antireligieux doivent entraîner une tolérance zéro », a pour sa part réclamé sur CNews le président du Consistoire central, Elie Korchia. En 2024, 1 570 actes antisémites ont été recensés en France, selon le ministère de l’intérieur.