Eté comme hiver, le sergent Cyrille Chahboune porte le short. Ça permet aux regards inquisiteurs d’identifier immédiatement ses deux prothèses. Cela prévient également de tout risque de chute, provoquée par un bout de pantalon pris dans leur articulation. « Et parce que je n’ai plus jamais froid aux jambes », plaisante-t-il.
Le 2 octobre 2016 – deux semaines à peine après son mariage –, lors d’une opération contre l’Etat islamique, celui qui est alors membre des forces spéciales en tant que commando parachutiste de l’air (CPA) est grièvement blessé en Irak, dans l’explosion d’un drone piégé qui tue sur le coup deux combattants kurdes partenaires. Huit ans plus tard, à 37 ans, Cyrille Chahboune s’apprête à disputer ses premiers Jeux paralympiques à Paris (du 28 août au 8 septembre) au sein de l’équipe de France de volley assis.
On ne passe pas dix ans dans l’armée sans cultiver un goût pour la camaraderie ; aussi, plutôt que l’équipe de France de tir sportif, il a privilégié un sport collectif. D’autant que son parcours est étroitement lié à celui de son frère d’armes, Guillaume Ducrocq, amputé d’une jambe lors de la même explosion. Les deux restent coéquipiers, désormais sous le maillot bleu et au club du Haillan, en banlieue bordelaise.

Engagé à 19 ans, le jeune Médocain sert lors de nombreuses opérations extérieures au Tchad, en Afghanistan, en Libye… jusqu’à sa dernière mission en préparation de la bataille de Mossoul contre Daech. Ce jour-là, un drone arborant les couleurs canadiennes survole les positions de son groupe. « On est sensibilisé à ce que les drones puissent lâcher des explosifs à la verticale, relate Cyrille Chahboune. Mais comment justifier d’abattre un drone ami ? »
Peur de ne jamais remarcher
L’engin non identifié s’écrase quelques kilomètres plus loin, avant d’être ramené par les forces kurdes. Méfiants, les Français gardent leurs distances. « Je suis à quatre mètres derrière un véhicule. Guillaume est à six mètres derrière un autre. On commence à le photographier pour l’envoyer aux Canadiens », se souvient-il. Soudain, la terre tremble sous ses pieds. Désorienté par le souffle de l’explosion, le sergent ne perd pas connaissance et s’efforce de reprendre ses esprits.
« Je ne sais pas si c’est un tir de mortier, une roquette ou le drone, se remémore-t-il. Je vérifie mes membres supérieurs, puis je vois la moitié de ma jambe gauche arrachée qui pend par des lambeaux de peau et le pantalon. Je pose mon garrot. » L’explosion qui le brûle au deuxième degré a cautérisé la plaie, mais n’empêche pas l’hémorragie interne.
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