« Le monde du travail ne ressemble plus qu’à une jungle. » Il y a quelques jours, le député du parti Syriza (gauche, opposition) Giorgos Gavrilos s’est indigné devant le Parlement grec, égrenant les mesures prises par le gouvernement conservateur au pouvoir : allongement du temps de travail, affaiblissement du corps de l’inspection du travail, criminalisation de l’action syndicale… « Un environnement négatif, anarchique et arbitraire a été créé pour le travailleur », a-t-il fustigé.
L’objet de sa colère, en particulier : l’entrée en application, le 1er juillet, d’une loi qui permet aux entreprises fonctionnant en continu (c’est-à-dire fournissant des services vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept) ou aux entreprises déclarant une « charge de travail » (ce qu’elles devront prouver à l’inspection du travail en cas de contrôle) de faire travailler leurs salariés six jours par semaine, soit quarante-huit heures – ou deux heures supplémentaires lors de leurs cinq jours de travail. L’employé recevra un salaire majoré de 40 % pour le sixième jour de travail. Si celui-ci tombe un dimanche ou un jour férié, l’augmentation atteindra 115 %.
Dans une interview donnée à la chaîne américaine CNN, le 13 juillet, le premier ministre, Kyriakos Mitsotakis, a néanmoins insisté : « La Grèce n’instaure pas la semaine de travail de six jours (…). Cela est appliqué uniquement dans des circonstances exceptionnelles, dans une très petite minorité d’entreprises. »
« Je veux arrêter, car les conditions de travail sont éprouvantes »
Selon lui, l’augmentation du temps légal de travail est nécessaire dans certains cas, en raison de la diminution de la population et de la pénurie de travailleurs qualifiés. Il rappelle que plus de 500 000 Grecs, pour la plupart des jeunes diplômés, se sont expatriés depuis la crise économique, en 2010.
Le gouvernement assure aussi que cela permettrait de lutter contre le travail au noir, car de nombreux salariés enchaînent deux emplois ou cumulent des heures supplémentaires pour s’en sortir – mais, jusqu’à présent, ils ne pouvaient pas les déclarer officiellement, puisque le travail était limité à onze heures par jour et à quarante-huit heures par semaine.
Dans les secteurs du tourisme et de la restauration, un sixième jour de travail est déjà prévu et régulé par une convention collective. Tilemachos Pappas, serveur sur une île touristique, travaille ainsi déjà six jours par semaine de mai à octobre. « Je veux arrêter, car les conditions de travail sont éprouvantes. Je pense que cette mesure aura juste pour effet de faire fuir encore plus les jeunes à l’étranger. On ne s’expatrie pas juste parce que les salaires sont meilleurs ailleurs en Europe, mais aussi en raison de ces abus de la part des employeurs », dit en soupirant le trentenaire.
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