
Debout devant les principales figures de l’islam en France, invitées à l’Elysée en février 2023, le président de la République avait lâché cette phrase : « Nous avons décidé de mettre fin au CFCM. » Un propos un peu expéditif : il n’appartient en effet pas à l’Etat de mettre fin au Conseil français du culte musulman, association loi 1901 créée en 2003 sous l’égide de Nicolas Sarkozy afin de disposer d’un interlocuteur représentatif des musulmans de France.
Pour le chef de l’Etat, il n’est plus cet interlocuteur. Après vingt ans d’existence, il a été jugé non efficace, peu représentatif, et servant les intérêts de certaines fédérations musulmanes au détriment d’autres. En 2022, le gouvernement a donc créé le Forum de l’islam de France (Forif), instance de dialogue organisée localement, au niveau de chaque département, visant à réfléchir à l’organisation de l’islam et à prendre le relais du CFCM.
Pour beaucoup d’observateurs, ce dernier avait alors vocation à disparaître. Il était devenu, selon un imam en vue s’exprimant sous couvert d’anonymat, « une coquille vide ». En 2021, plusieurs fédérations, dont celle de la Grande Mosquée de Paris, affiliée à l’Algérie, avaient claqué la porte. La mort annoncée du CFCM n’était pour beaucoup qu’une question de temps.
Le tournant de la guerre à Gaza
Pourtant force est de constater qu’il n’en est rien. L’association codirigée aujourd’hui par Mohammed Moussaoui, par ailleurs à la tête de l’Union des mosquées de France (UMF), affiliée au Maroc, et Ibrahim Alci, président du Comité de coordination des musulmans turcs de France, se refait même une nouvelle jeunesse depuis quelques mois. Elle investit l’espace public à coups de tribunes et de communiqués publiés à une cadence inédite depuis l’attaque terroriste du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, et la riposte contre Gaza qui a suivi.
« Les événements depuis trois mois nous concernent. Nous publions des communiqués sur toutes les questions qui touchent le culte musulman », fait ainsi valoir Mohammed Moussaoui. Les textes produits cherchent, expliquent leurs auteurs, à exprimer le point de vue des musulmans en France sur un conflit qui les touche de plusieurs façons.
En novembre, au lendemain de la marche contre l’antisémitisme, M. Moussaoui faisait d’ailleurs partie des représentants du culte invités à l’Elysée. Au ministère de l’intérieur, on avait tenu à préciser qu’il était présent au titre de sa fédération, l’UMF. Lui pourtant se présentait clairement comme codirigeant du CFCM…
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