Entre deux dépôts d’amendements, Laurent Marcangeli, chef de file des députés Horizons, est venu chercher un peu de répit à la buvette de l’Assemblée nationale, haut lieu de bavardages. Mais ce jeudi 14 mars, les mines des parlementaires de son camp sont crispées. « Si on n’arrive pas à dépasser les 20 %, ça va être “hardos” », lui lance un élu Renaissance.
Voilà trois jours qu’a été publiée la troisième vague du sondage Ipsos pour Le Monde, le Cevipof, la Fondation Jean Jaurès et l’Institut Montaigne, en vue des élections européennes du 9 juin. L’étude a soulevé un vent de panique dans le camp présidentiel. La liste du Rassemblement national (RN), conduite par Jordan Bardella, recueille 31 % des intentions de vote, loin devant les 18 % de la coalition Renaissance-Horizons-MoDem, emmenée par Valérie Hayer. Non seulement l’écart se creuse, à trois mois du scrutin, mais l’électorat macroniste « se rétrécit sur son cœur bourgeois et âgé de centre droit », analyse Gilles Finchelstein, secrétaire général de la Fondation Jean Jaurès.
« Ce recul, sur à peu près toutes les catégories de la population, nous sommes nombreux à le ressentir sur le terrain, commente le député de Paris Gilles Le Gendre (Renaissance). Il est probablement lié au brouillage de nos messages politiques depuis 2022. » « Je le sens, la dynamique n’est pas bonne, constate Laurent Marcangeli. Je ne panique pas, mais ce qui fait peur, c’est que les européennes, c’est le dernier scrutin national avant 2027. Si on se prend une “taule”, comme le Parti socialiste en 1993… »
Le spleen des élus du camp présidentiel s’est encore aggravé à la lecture d’un sondage « secret », commandé en décembre 2023 par Les Républicains (LR), que les parlementaires se transmettent dans les boucles WhatsApp et Telegram. Révélée par L’Obs le 15 mars, l’étude fait du RN le grand vainqueur en cas d’élections législatives anticipées, à onze voix de la majorité absolue.
Le risque d’« un coup de tonnerre politique »
L’atmosphère oppressante de la guerre « aux portes de l’Europe », selon les mots d’Emmanuel Macron, entre l’Ukraine et la Russie, et les liens du RN avec le Kremlin, dénoncés sans relâche par la Macronie, ne brisent pas l’élan du parti d’extrême droite. Sur le terrain, la dramatisation du contexte géopolitique ne contribue pas à renforcer le camp présidentiel, soupire la députée du Nord Violette Spillebout (Renaissance), constatant que la population est plus encline au « repli sur soi » qu’à se préoccuper du conflit en Ukraine.
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